Actualités de l'Urgence - APM

06/06 2024
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URGENCES: LA FLUIDITÉ DES PASSAGES AUX URGENCES DOIT DEVENIR UNE PRIORITÉ MINISTÉRIELLE (SAMU-URGENCES DE FRANCE)

(Par Caroline BESNIER, au congrès Urgences 2024)

PARIS, 6 juin 2024 (APMnews) - La fluidité des passages aux urgences doit devenir une priorité ministérielle, avec des objectifs de résultat intégrés au financement à la qualité, a martelé jeudi le président de Samu-Urgences de France (SUDF), Marc Noizet, lors d'une conférence de presse organisée avec la Société française de médecine d'urgence (SFMU) dans le cadre du congrès Urgences 2024.

Malgré les difficultés rencontrées par les urgences, en particulier au niveau des ressources humaines, aucun ministre ne devrait se rendre cette année au congrès, l'invitation ayant été déclinée par le ministre délégué chargé de la santé et de la prévention, Frédéric Valletoux, en raison du devoir de réserve à l'approche des élections européennes prévues dimanche.

Marc Noizet a néanmoins insisté sur la nécessité de faire du sujet de la fluidité des urgences et de leur aval une "priorité ministérielle".

Il a rappelé la volonté du président de la République, Emmanuel Macron, en avril 2023, que tous les services d'urgence soient désengorgés pour fin 2024 (cf dépêche du 17/04/2023 à 21:04) et les promesses réitérées depuis des années à ce sujet. "Cette problématique de l'engorgement des services, lié à des gens qui restent sur des brancards parce qu'ils ne trouvent pas de place d'hospitalisation", "ça fait 10 ans qu'on en parle", et ça a donné lieu à de nombreux rapports et propositions, a rappelé le président de SUDF.

Pour autant, "ça reste évidemment un point épineux" car il y a "une mortalité induite" par ce "dysfonctionnement hospitalier", a-t-il pointé.

Ce problème d'aval et ce temps passé dans les couloirs des urgences sont qualifiés aujourd'hui de "nouvelle maladie nosocomiale" parce qu'il y a une morbidité augmentée (cf dépêche du 06/11/2023 à 18:55), a-t-il souligné.

Cette situation augmente par ailleurs la pénibilité pour les professionnels de santé qui "fuient les services où il y a beaucoup de patients allongés sur des brancards parce que c'est insupportable", a déploré Marc Noizet.

Enfin, il a regretté que les hôpitaux se soient hyperspécialisés, compliquant la recherche de places pour les patients polypathologiques.

"Il faut changer le paradigme hospitalier" en donnant de la place à une médecine polyvalente hospitalière qui n'existe pas aujourd'hui. "Si on doit rouvrir des lits, il faut ouvrir des lits de médecine polyvalente et surtout pas des lits de spécialité", a-t-il fait valoir. Louis Soulat, vice-président de SUDF, a également estimé qu'il fallait "déspécialiser des lits".

Il a par ailleurs rappelé le fait que l'absence d'aval pour les patients psychiatriques embolisait grandement les services d'urgence. La gestion des urgences psychiatriques au sein des urgences pose également un problème.

Marc Noizet appelle donc à changer de "paradigme politique".

Les dirigeants sont conscients du problème et ont tous les éléments en main mais "on n'arrive pas à passer à l'action" parce que "ce n'est pas une priorité ministérielle", a-t-il commenté.

Pour lui, il ne s'agit pas d'"une problématique d'urgence" mais d'une "problématique de structure". "Ça gêne et c'est foncièrement compliqué parce que ça touche à l'organisation même du parcours du patient d'une manière générale, et pas qu'aux urgences."

Pour fluidifier l'aval, le président de SUDF a appelé à déployer toutes les mesures déjà connues et colligées par l'Agence nationale de la performance sanitaire et médico-sociale (Anap) au cours des dernières années. "La partition, on la connaît, c'est juste une question aujourd'hui de chef d'orchestre", a-t-il insisté.

"C'est de l'organisation, de l'adaptation, de la priorisation", on a tous les moyens pour le faire, a-t-il insisté. "C'est juste une question de volonté politique."

Des gestionnaires de lits pas que contemplatifs (SFMU)

Pour la présidente de la SFMU, Sandrine Charpentier, il faut désormais parler de "besoin global d'un établissement" et ne plus opposer activité programmée et non programmée.

Elle a déploré le fait que les gestionnaires de lits actuels ne soient que "contemplatifs" et a appelé à mettre en place des "cellules d'ordonnancement des lits", capables d'organiser l'hospitalisation programmée ou non.

Elle a rappelé que les établissements de santé sont capables de savoir tous les jours de manière précise combien de lits sont nécessaires pour l'activité non programmée, longtemps considérée comme "désorganisante". Ce besoin qui peut être anticipé "doit être intégré dans l'organisation de l'hôpital", a-t-elle argué.

"C'est un problème hospitalier et non des urgences", qui nécessite une "réponse étatique", a-t-elle également souligné.

Un indicateur sur les lits brancards avec un impact sur le financement

Marc Noizet juge nécessaire que les établissements de santé assument le fait de dysfonctionner. "Nous sommes mauvais, on l'assume et on met un chiffre" à rendre public, a-t-il lancé en évoquant le nombre de lits brancards comme indicateur, pouvant être calculé automatiquement.

SUDF a porté au cours des dernières années le "no bed challenge", dispositif qui répertorie tous les matins le nombre de patients ayant dû rester sur un brancard durant la nuit faute de lits d'hospitalisation. "Mais c'est fragile" car c'est fondé sur du déclaratif, a-t-il observé.

Il table plutôt sur une solution trouvée pour automatiser cet indicateur "à partir des flux informatiques qui sortent des services d'urgence".

Marc Noizet préconise aussi d'intégrer des objectifs de fluidité des structures des urgences au financement à la qualité pour passer à un financement au résultat plutôt qu'incitatif. "Sinon, il n'y aura pas de modification", a-t-il observé.

Aujourd'hui dans le cadre de la tarification à l'activité (T2A), "l'hôpital a tout intérêt à organiser une activité programmée optimale" sur le plan financier, a renchéri Sandrine Charpentier.

Interrogé sur le projet d'un financement mixte pour les soins non programmés dans le cadre de la réforme du financement des activités de médecine, chirurgie, obstétrique (MCO) (cf dépêche du 23/05/2024 à 09:27), Marc Noizet a observé que les réformes de financement ont "des temporalités relativement longues".

S'agissant de l'amont des urgences, Louis Soulat a rappelé que la SFMU, SUDF, le collège de médecine générale et le Groupe francophone de réanimation et d'urgences pédiatriques (GFRUP) ont diffusé en avril des préconisations sur la régulation préalable à l'accès aux urgences (cf dépêche du 07/06/2023 à 19:05).

Il a insisté sur le fait que réguler l'accès aux urgences ne dégradait pas l'accès aux soins et que l'objectif à terme était de rendre systématique l'appel au Samu/service d'accès aux soins (SAS).

cb/ab/APMnews

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(Par Caroline BESNIER, au congrès Urgences 2024)

PARIS, 6 juin 2024 (APMnews) - La fluidité des passages aux urgences doit devenir une priorité ministérielle, avec des objectifs de résultat intégrés au financement à la qualité, a martelé jeudi le président de Samu-Urgences de France (SUDF), Marc Noizet, lors d'une conférence de presse organisée avec la Société française de médecine d'urgence (SFMU) dans le cadre du congrès Urgences 2024.

Malgré les difficultés rencontrées par les urgences, en particulier au niveau des ressources humaines, aucun ministre ne devrait se rendre cette année au congrès, l'invitation ayant été déclinée par le ministre délégué chargé de la santé et de la prévention, Frédéric Valletoux, en raison du devoir de réserve à l'approche des élections européennes prévues dimanche.

Marc Noizet a néanmoins insisté sur la nécessité de faire du sujet de la fluidité des urgences et de leur aval une "priorité ministérielle".

Il a rappelé la volonté du président de la République, Emmanuel Macron, en avril 2023, que tous les services d'urgence soient désengorgés pour fin 2024 (cf dépêche du 17/04/2023 à 21:04) et les promesses réitérées depuis des années à ce sujet. "Cette problématique de l'engorgement des services, lié à des gens qui restent sur des brancards parce qu'ils ne trouvent pas de place d'hospitalisation", "ça fait 10 ans qu'on en parle", et ça a donné lieu à de nombreux rapports et propositions, a rappelé le président de SUDF.

Pour autant, "ça reste évidemment un point épineux" car il y a "une mortalité induite" par ce "dysfonctionnement hospitalier", a-t-il pointé.

Ce problème d'aval et ce temps passé dans les couloirs des urgences sont qualifiés aujourd'hui de "nouvelle maladie nosocomiale" parce qu'il y a une morbidité augmentée (cf dépêche du 06/11/2023 à 18:55), a-t-il souligné.

Cette situation augmente par ailleurs la pénibilité pour les professionnels de santé qui "fuient les services où il y a beaucoup de patients allongés sur des brancards parce que c'est insupportable", a déploré Marc Noizet.

Enfin, il a regretté que les hôpitaux se soient hyperspécialisés, compliquant la recherche de places pour les patients polypathologiques.

"Il faut changer le paradigme hospitalier" en donnant de la place à une médecine polyvalente hospitalière qui n'existe pas aujourd'hui. "Si on doit rouvrir des lits, il faut ouvrir des lits de médecine polyvalente et surtout pas des lits de spécialité", a-t-il fait valoir. Louis Soulat, vice-président de SUDF, a également estimé qu'il fallait "déspécialiser des lits".

Il a par ailleurs rappelé le fait que l'absence d'aval pour les patients psychiatriques embolisait grandement les services d'urgence. La gestion des urgences psychiatriques au sein des urgences pose également un problème.

Marc Noizet appelle donc à changer de "paradigme politique".

Les dirigeants sont conscients du problème et ont tous les éléments en main mais "on n'arrive pas à passer à l'action" parce que "ce n'est pas une priorité ministérielle", a-t-il commenté.

Pour lui, il ne s'agit pas d'"une problématique d'urgence" mais d'une "problématique de structure". "Ça gêne et c'est foncièrement compliqué parce que ça touche à l'organisation même du parcours du patient d'une manière générale, et pas qu'aux urgences."

Pour fluidifier l'aval, le président de SUDF a appelé à déployer toutes les mesures déjà connues et colligées par l'Agence nationale de la performance sanitaire et médico-sociale (Anap) au cours des dernières années. "La partition, on la connaît, c'est juste une question aujourd'hui de chef d'orchestre", a-t-il insisté.

"C'est de l'organisation, de l'adaptation, de la priorisation", on a tous les moyens pour le faire, a-t-il insisté. "C'est juste une question de volonté politique."

Des gestionnaires de lits pas que contemplatifs (SFMU)

Pour la présidente de la SFMU, Sandrine Charpentier, il faut désormais parler de "besoin global d'un établissement" et ne plus opposer activité programmée et non programmée.

Elle a déploré le fait que les gestionnaires de lits actuels ne soient que "contemplatifs" et a appelé à mettre en place des "cellules d'ordonnancement des lits", capables d'organiser l'hospitalisation programmée ou non.

Elle a rappelé que les établissements de santé sont capables de savoir tous les jours de manière précise combien de lits sont nécessaires pour l'activité non programmée, longtemps considérée comme "désorganisante". Ce besoin qui peut être anticipé "doit être intégré dans l'organisation de l'hôpital", a-t-elle argué.

"C'est un problème hospitalier et non des urgences", qui nécessite une "réponse étatique", a-t-elle également souligné.

Un indicateur sur les lits brancards avec un impact sur le financement

Marc Noizet juge nécessaire que les établissements de santé assument le fait de dysfonctionner. "Nous sommes mauvais, on l'assume et on met un chiffre" à rendre public, a-t-il lancé en évoquant le nombre de lits brancards comme indicateur, pouvant être calculé automatiquement.

SUDF a porté au cours des dernières années le "no bed challenge", dispositif qui répertorie tous les matins le nombre de patients ayant dû rester sur un brancard durant la nuit faute de lits d'hospitalisation. "Mais c'est fragile" car c'est fondé sur du déclaratif, a-t-il observé.

Il table plutôt sur une solution trouvée pour automatiser cet indicateur "à partir des flux informatiques qui sortent des services d'urgence".

Marc Noizet préconise aussi d'intégrer des objectifs de fluidité des structures des urgences au financement à la qualité pour passer à un financement au résultat plutôt qu'incitatif. "Sinon, il n'y aura pas de modification", a-t-il observé.

Aujourd'hui dans le cadre de la tarification à l'activité (T2A), "l'hôpital a tout intérêt à organiser une activité programmée optimale" sur le plan financier, a renchéri Sandrine Charpentier.

Interrogé sur le projet d'un financement mixte pour les soins non programmés dans le cadre de la réforme du financement des activités de médecine, chirurgie, obstétrique (MCO) (cf dépêche du 23/05/2024 à 09:27), Marc Noizet a observé que les réformes de financement ont "des temporalités relativement longues".

S'agissant de l'amont des urgences, Louis Soulat a rappelé que la SFMU, SUDF, le collège de médecine générale et le Groupe francophone de réanimation et d'urgences pédiatriques (GFRUP) ont diffusé en avril des préconisations sur la régulation préalable à l'accès aux urgences (cf dépêche du 07/06/2023 à 19:05).

Il a insisté sur le fait que réguler l'accès aux urgences ne dégradait pas l'accès aux soins et que l'objectif à terme était de rendre systématique l'appel au Samu/service d'accès aux soins (SAS).

cb/ab/APMnews

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