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17/09 2024
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URGENCES: DÉGRADATION DE LA SITUATION CET ÉTÉ PAR RAPPORT À 2023 (ENQUÊTE SUDF)

PARIS, 17 septembre 2024 (APMnews) - L'association Samu-Urgences de France (SUdF) a dénoncé mardi une dégradation du fonctionnement des services d'urgence au cours de l'été 2024, en se basant sur l'avis de 61% des structures ayant répondu à son enquête estivale.

L'enquête de SUdF, dont les résultats -à rebours du discours des autorités- sont publiés mardi, a été réalisée entre le 20 août et le jeudi 12 septembre, "avec 453 formulaires exploitables", soit 331 des services d'urgences répondants (48%) et 221 Smur (51%).

Elle portait sur l'organisation et le fonctionnement des services d'urgence et des Smur sur la période du 1er juillet au 31 août, et s'organisait autour de trois sujets: l'état des services d'urgence, la disponibilité en lits en aval et la disponibilité des Smur.

Dans leurs réponses, 61% des urgentistes répondants ont estimé "qu'il y a une dégradation de la situation de cet été par rapport à 2023", tandis que seuls "30% considèrent que cette situation reste stable".

Ces constats vont à l'encontre du discours tenu durant l'été par le ministre délégué démissionnaire chargé de la santé et de la prévention, Frédéric Valletoux, faisant état d'une situation en amélioration par rapport à l'été 2023, avec seulement une "cinquantaine" d'hôpitaux "en tension" (cf dépêche du 20/08/2024 à 17:34), comme n'a pas manqué de le souligner l'organisation de médecins urgentistes.

"Le fonctionnement en mode dégradé de nos structures de médecine d'urgence est devenu 'habituel'", a déploré Samu-Urgences de France. "Mais ce qui a changé depuis l'été 2023, c'est l'installation d'une résignation des professionnels dans l'indifférence la plus générale."

Si l'association s'accorde avec le constat émis début septembre par la Fédération hospitalière de France (FHF) pour reconnaître que les crises ont pu être anticipées avec les agences régionales de santé (ARS, cf dépêche du 04/09/2024 à 16:43), SUdF estime que cela n'a que permis la meilleure "mise en œuvre d'une dégradation organisée des soins, et aucunement d'améliorer ni la situation ni les conditions d'accueil des patients".

Ainsi 61% des services d'urgences répondants ont déclaré avoir fermé "au moins une ligne médicale", soit 202 des 331 établissements représentés dans l'enquête, dont 18% qui ont dû fermer plusieurs lignes.

"Ces fermetures concernent 84 départements (sur 106 départements, Drom-COM compris)", poursuit SUdF, en précisant que ces fermetures étaient "continues" dans 41% des cas, "fréquentes" pour 37% et "ponctuelles" pour une minorité de répondants (21%).

La régulation médicale d'accès comme réponse à des "ressources humaines insuffisantes"

Un tiers (34%) des Samu ont eu recours à une régulation médicale d'accès par le 15 durant l'été, souvent de façon contrainte: "Parmi les 331 SU représentés dans l'enquête, 82 ont mis en place la régulation médicale d'accès, comme mesure d'adaptation vis-à-vis de ressources humaines insuffisantes afin de diminuer la pression liée à l'activité."

Cela n'a pas empêché pour autant le nombre de passages d'urgence d'augmenter de plus de 3% durant l'été, a fait remarquer SUdF, en citant à l'appui les données du réseau Oscour*.

L'enquête de SUdF met également en lumière une pression accrue sur la disponibilité de lits d'hospitalisation en aval des urgences, à commencer par les lits de réanimation: 23% des établissements étudiés dans cette enquête ont fermé des lits de réanimation de manière durable cet été, en plus des fermetures estivales habituelles: au total près de 270 lits de réanimation fermés dans 56 établissements.

Un quart des répondants ont jugé qu'il y avait "une augmentation des difficultés en 2024 sur les lits de soins critiques comparativement à 2023".

"Les prétendues leçons de la pandémie Covid sur la nécessité d'un nombre de places en réanimation et en soins intensifs sont déjà oubliées par les tutelles et le gouvernement", a déploré SUdF.

Concernant les capacités en médecine, chirurgie et obstétrique (MCO), la part d'établissements ayant fermé des lits "de manière durable cet été" s'élève à 65%. "Ce sont plus de 1.500 lits supplémentaires qui ont été fermés dans les établissements participant à cette enquête, alors même que l'activité ne connaît pas de baisse dans le SU durant la période estivale, avec un besoin de lits d'hospitalisation qui reste stable."

Enfin, concernant le volet de l'enquête consacré au Smur fait apparaît que 127 Smur ont fermé au moins une fois une ligne durant l'été, soit 174 lignes Smur fermées au global, "dont 48 fermetures fréquentes ou continues".

"Parmi les répondants, 101 n'ont qu'une seule ligne Smur dont 10% d'entre eux ont dû fermer cette ligne, laissant le secteur sans aucune réponse Smur pour répondre à l'urgence vitale de ces territoires", a pointé SUdF.

En cas de fermeture d'une ligne Smur, 14% des établissements répondants ont mis en place une unité mobile hospitalière paramédicale (UMH-P) "afin de remplacer une ligne Smur fermée, soit 35 établissements".

Cette adaptation ne saurait être satisfaisante dès lors que 30% des établissements ayant procédé de la sorte n'avaient qu'une ligne Smur.

SUdF note par ailleurs que "de nombreux hélismurs ont connu cet été des ruptures de fonctionnement essentiellement pour des raisons de maintenance des machines, rendant impossible l'accès rapide à distance des bases ou le gain en disponibilité des équipes Smur en cas de transferts longs".

Dix propositions réparties en trois axes

Après avoir brossé ces constats, Samu-Urgences de France a formulé 10 propositions réparties en trois axes pour remédier à cette dégradation du fonctionnement des urgences.

Concernant l'aval des urgences, l'organisation d'urgentistes propose:

  • de réserver une place spécifiquement pour les hospitalisations des patients non programmés arrivant des urgences
  • d'afficher un indicateur recensant quotidiennement les lits brancards, pour "assumer la maltraitance institutionnelle"
  • d'intégrer cet indicateur lit-brancard dans les indicateurs de financement des activités à la qualité (Ifaq), "afin de passer à un financement basé sur les résultats"
  • de mettre en œuvre les recommandations de l'Agence nationale de la performance sanitaire et médico-sociale (Anap) "concernant la gestion des lits".

Pour "arrêter définitivement le fonctionnement dégradé des structures d'urgence", SUdF demande:

  • de réviser le maillage territorial des services d'urgence (SU), soulignant "[qu']il n'est plus viable de maintenir tous les SU actuellement autorisés par les ARS selon les modalités d'organisation actuelle"
  • de créer des centres de soins primaires pour accompagner cette révision du maillage
  • de généraliser progressivement la régulation médicale d'accès aux urgences
  • de mettre en place un "ratio patients/soignés" au sein des services d'urgence, comme prévu par la proposition de loi portée par Bernard Jomier (socialiste, Paris) votée en février 2023 en première lecture au Sénat (cf dépêche du 01/02/2023 à 19:12)

Enfin sur les Smur, l'association réclame le rétablissement du maillage opérationnel des Smur et des hélismurs ainsi que la poursuite du déploiement des UMH-P sous réserve que celle-ci se fasse "dans le cadre de la gradation d'engagement des Smur, et l'optimisation des ressources médicales, et non pas dans la dégradation de l'offre de soins préhospitaliers".

Dans sa précédente enquête estivale, publiée en septembre 2023, SUdF avait souligné que 163 services d'urgence avaient été contraints de fermer "faute de ressources humaines" au cours de l'été 2023, dont 43% à plus de 10 reprises (cf dépêche du 06/09/2023 à 07:00).

gl/ab/APMnews

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URGENCES: DÉGRADATION DE LA SITUATION CET ÉTÉ PAR RAPPORT À 2023 (ENQUÊTE SUDF)

PARIS, 17 septembre 2024 (APMnews) - L'association Samu-Urgences de France (SUdF) a dénoncé mardi une dégradation du fonctionnement des services d'urgence au cours de l'été 2024, en se basant sur l'avis de 61% des structures ayant répondu à son enquête estivale.

L'enquête de SUdF, dont les résultats -à rebours du discours des autorités- sont publiés mardi, a été réalisée entre le 20 août et le jeudi 12 septembre, "avec 453 formulaires exploitables", soit 331 des services d'urgences répondants (48%) et 221 Smur (51%).

Elle portait sur l'organisation et le fonctionnement des services d'urgence et des Smur sur la période du 1er juillet au 31 août, et s'organisait autour de trois sujets: l'état des services d'urgence, la disponibilité en lits en aval et la disponibilité des Smur.

Dans leurs réponses, 61% des urgentistes répondants ont estimé "qu'il y a une dégradation de la situation de cet été par rapport à 2023", tandis que seuls "30% considèrent que cette situation reste stable".

Ces constats vont à l'encontre du discours tenu durant l'été par le ministre délégué démissionnaire chargé de la santé et de la prévention, Frédéric Valletoux, faisant état d'une situation en amélioration par rapport à l'été 2023, avec seulement une "cinquantaine" d'hôpitaux "en tension" (cf dépêche du 20/08/2024 à 17:34), comme n'a pas manqué de le souligner l'organisation de médecins urgentistes.

"Le fonctionnement en mode dégradé de nos structures de médecine d'urgence est devenu 'habituel'", a déploré Samu-Urgences de France. "Mais ce qui a changé depuis l'été 2023, c'est l'installation d'une résignation des professionnels dans l'indifférence la plus générale."

Si l'association s'accorde avec le constat émis début septembre par la Fédération hospitalière de France (FHF) pour reconnaître que les crises ont pu être anticipées avec les agences régionales de santé (ARS, cf dépêche du 04/09/2024 à 16:43), SUdF estime que cela n'a que permis la meilleure "mise en œuvre d'une dégradation organisée des soins, et aucunement d'améliorer ni la situation ni les conditions d'accueil des patients".

Ainsi 61% des services d'urgences répondants ont déclaré avoir fermé "au moins une ligne médicale", soit 202 des 331 établissements représentés dans l'enquête, dont 18% qui ont dû fermer plusieurs lignes.

"Ces fermetures concernent 84 départements (sur 106 départements, Drom-COM compris)", poursuit SUdF, en précisant que ces fermetures étaient "continues" dans 41% des cas, "fréquentes" pour 37% et "ponctuelles" pour une minorité de répondants (21%).

La régulation médicale d'accès comme réponse à des "ressources humaines insuffisantes"

Un tiers (34%) des Samu ont eu recours à une régulation médicale d'accès par le 15 durant l'été, souvent de façon contrainte: "Parmi les 331 SU représentés dans l'enquête, 82 ont mis en place la régulation médicale d'accès, comme mesure d'adaptation vis-à-vis de ressources humaines insuffisantes afin de diminuer la pression liée à l'activité."

Cela n'a pas empêché pour autant le nombre de passages d'urgence d'augmenter de plus de 3% durant l'été, a fait remarquer SUdF, en citant à l'appui les données du réseau Oscour*.

L'enquête de SUdF met également en lumière une pression accrue sur la disponibilité de lits d'hospitalisation en aval des urgences, à commencer par les lits de réanimation: 23% des établissements étudiés dans cette enquête ont fermé des lits de réanimation de manière durable cet été, en plus des fermetures estivales habituelles: au total près de 270 lits de réanimation fermés dans 56 établissements.

Un quart des répondants ont jugé qu'il y avait "une augmentation des difficultés en 2024 sur les lits de soins critiques comparativement à 2023".

"Les prétendues leçons de la pandémie Covid sur la nécessité d'un nombre de places en réanimation et en soins intensifs sont déjà oubliées par les tutelles et le gouvernement", a déploré SUdF.

Concernant les capacités en médecine, chirurgie et obstétrique (MCO), la part d'établissements ayant fermé des lits "de manière durable cet été" s'élève à 65%. "Ce sont plus de 1.500 lits supplémentaires qui ont été fermés dans les établissements participant à cette enquête, alors même que l'activité ne connaît pas de baisse dans le SU durant la période estivale, avec un besoin de lits d'hospitalisation qui reste stable."

Enfin, concernant le volet de l'enquête consacré au Smur fait apparaît que 127 Smur ont fermé au moins une fois une ligne durant l'été, soit 174 lignes Smur fermées au global, "dont 48 fermetures fréquentes ou continues".

"Parmi les répondants, 101 n'ont qu'une seule ligne Smur dont 10% d'entre eux ont dû fermer cette ligne, laissant le secteur sans aucune réponse Smur pour répondre à l'urgence vitale de ces territoires", a pointé SUdF.

En cas de fermeture d'une ligne Smur, 14% des établissements répondants ont mis en place une unité mobile hospitalière paramédicale (UMH-P) "afin de remplacer une ligne Smur fermée, soit 35 établissements".

Cette adaptation ne saurait être satisfaisante dès lors que 30% des établissements ayant procédé de la sorte n'avaient qu'une ligne Smur.

SUdF note par ailleurs que "de nombreux hélismurs ont connu cet été des ruptures de fonctionnement essentiellement pour des raisons de maintenance des machines, rendant impossible l'accès rapide à distance des bases ou le gain en disponibilité des équipes Smur en cas de transferts longs".

Dix propositions réparties en trois axes

Après avoir brossé ces constats, Samu-Urgences de France a formulé 10 propositions réparties en trois axes pour remédier à cette dégradation du fonctionnement des urgences.

Concernant l'aval des urgences, l'organisation d'urgentistes propose:

  • de réserver une place spécifiquement pour les hospitalisations des patients non programmés arrivant des urgences
  • d'afficher un indicateur recensant quotidiennement les lits brancards, pour "assumer la maltraitance institutionnelle"
  • d'intégrer cet indicateur lit-brancard dans les indicateurs de financement des activités à la qualité (Ifaq), "afin de passer à un financement basé sur les résultats"
  • de mettre en œuvre les recommandations de l'Agence nationale de la performance sanitaire et médico-sociale (Anap) "concernant la gestion des lits".

Pour "arrêter définitivement le fonctionnement dégradé des structures d'urgence", SUdF demande:

  • de réviser le maillage territorial des services d'urgence (SU), soulignant "[qu']il n'est plus viable de maintenir tous les SU actuellement autorisés par les ARS selon les modalités d'organisation actuelle"
  • de créer des centres de soins primaires pour accompagner cette révision du maillage
  • de généraliser progressivement la régulation médicale d'accès aux urgences
  • de mettre en place un "ratio patients/soignés" au sein des services d'urgence, comme prévu par la proposition de loi portée par Bernard Jomier (socialiste, Paris) votée en février 2023 en première lecture au Sénat (cf dépêche du 01/02/2023 à 19:12)

Enfin sur les Smur, l'association réclame le rétablissement du maillage opérationnel des Smur et des hélismurs ainsi que la poursuite du déploiement des UMH-P sous réserve que celle-ci se fasse "dans le cadre de la gradation d'engagement des Smur, et l'optimisation des ressources médicales, et non pas dans la dégradation de l'offre de soins préhospitaliers".

Dans sa précédente enquête estivale, publiée en septembre 2023, SUdF avait souligné que 163 services d'urgence avaient été contraints de fermer "faute de ressources humaines" au cours de l'été 2023, dont 43% à plus de 10 reprises (cf dépêche du 06/09/2023 à 07:00).

gl/ab/APMnews

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