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16/10 2024
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TENSIONS EN MARTINIQUE: LE CHU S'EST MIS "EN ORDRE DE BATAILLE POUR AJUSTER SON ORGANISATION" (DG)

(Par Maryannick LE BRIS)

FORT-DE-FRANCE, 16 octobre 2024 (APMnews) - Face aux mouvements sociaux sur le territoire, les équipes du CHU de Martinique se sont organisées pour assurer la continuité des services, ont expliqué Jérôme Le Brière, directeur général de l'établissement, et le Dr Albert Brizio, médecin urgentiste, lundi soir lors d'un entretien à APMnews.

"Au regard des nuitées de mercredi soir et de jeudi soir", où les tensions sociales dans le contexte du mouvement "contre la vie chère" se sont accrues en Martinique, "on a voulu déclencher le plan blanc et on s'est mis en ordre de bataille pour ajuster nos organisations, notre fonctionnement", a expliqué Jérôme Le Brière (cf dépêche du 11/10/2024 à 18:34).

Compte tenu de la situation, "que nous ne maîtrisons pas, et de la négociation encore en cours [entre l'Etat, les élus, le collectif à l'origine du mouvement et les acteurs économiques], il s'agit pour nous de garantir une qualité de prise en charge, des conditions de travail et une circulation de nos professionnels optimales", a souligné le directeur général du CHU. "On ne part pas dans l'idée de lever le plan blanc cette semaine", a-t-il ajouté.

Il a relaté des difficultés importantes pour se rendre au CHU, apparues "jeudi et vendredi", à la fois pour les professionnels et les patients, en raison des barrages. L'établissement a fait en sorte de "faciliter le fait que les professionnels arrivent 2, voire 3 heures avant leur prise de poste", avec des systèmes de relève. Ils "l'ont fait de façon vraiment volontariste", a-t-il souligné.

"Avec le président de la CME [commission médicale d'établissement], nous souhaitons saluer fortement la mobilisation de l'ensemble des professionnels de santé, qui prouvent vraiment qu'ils ont le sens du service public chevillé au corps", a insisté Jérôme Le Brière.

Dans le cadre de cette "gestion de crise", c'est un "esprit collectif qui se met en place", a-t-il encore relaté, évoquant un taux d'absentéisme qui n'est pas parti à la hausse et un taux de grévistes limité.

"Après trois, quatre ou cinq nuits à plus de 12 heures en amplitude horaire, entre le départ de leur domicile et le retour à domicile", les équipes "commencent à être fatiguées, la corde est tendue", a-t-il témoigné.

"On essaie de faciliter le fait que certains professionnels dorment sur site, la prise de repas, de rassurer sur le fait que toute heure faite au CHU" dans le cadre de cette organisation "sera payée en heure supplémentaire", a précisé Jérôme Le Brière.

S'agissant des patients, les médecins ont été "très vigilants au fait de ne pas déprogrammer, notamment en cancérologie ou des soins de semi-urgence". Il n'y a donc pas eu de "déprogrammations massives", notamment "parce que les professionnels étaient là, les blocs étaient ouverts", et "tout ce qui a été déprogrammé", notamment en raison des difficultés pour les patients de se rendre sur place, "a été reprogrammé".

"A l'heure où on se parle, les barrages sont moins nombreux qu'il y a trois ou quatre jours", a souligné Jérôme Le Brière lundi, précisant que le contexte invitait à la prudence quant à l'évolution de la situation.

"Ma priorité, ce sont les patients et les équipes", a-t-il pointé. "On reste mobilisés et le message que je veux faire passer assez fortement, qui est entendu par le plus grand nombre, c'est : sanctuarisons notre CHU, nos soignants, nos patients".

Pas d'accroissement d'appels au 15

Pour l'heure, les impacts sont difficiles "à quantifier", a estimé le directeur général du CHU, précisant vouloir analyser "à froid et objectivement", par un retour d'expérience, les incidences de ces perturbations sur la continuité des soins.

Il s'agit d'analyser les incidences "pour les patients qui de fait n'ont pas pu venir et n'ont pas pu honorer leurs rendez-vous", des déprogrammations qui ont eu lieu "vendredi, samedi et lundi", "les éventuelles pertes de chance", ainsi que l'organisation des relations avec les autorités pendant cette période, a détaillé Jérôme Le Brière.

"On sait que le ministère est pleinement mobilisé à nos côtés, que l'ARS [agence régionale de santé] nous soutient au quotidien", a-t-il relevé. Un appel à la réserve sanitaire pourrait permettre l'arrivée de quelques professionnels médicaux "ces jours-ci".

"Il n'y a pas eu d'accroissement important du nombre d'appels au 15" car "la population a, très bien compris qu’il fallait appeler uniquement quand c'était vraiment nécessaire", a rapporté le Dr Brizio.

"Le Samu, jusqu'à maintenant, a pu assurer la continuité du service auprès de la population, toutes les missions ont pu être exécutées", même si les accès ont "parfois été rendus difficiles, à cause des obstacles qui empêchaient de passer ou qui ralentissaient le passage, ce qui bien sûr induit des retards".

"Nous avons autant que possible essayé de surmonter ces obstacles au moment où ils étaient le plus importants", y compris en recourant à des hélicoptères, a-t-il témoigné. "La situation a été gérée, il n'y a pas eu des conséquences dramatiques" de ces entraves à la circulation.

L'ARS Martinique a annoncé samedi des mesures pour maintenir "une permanence des soins efficace" durant le week-end, afin de répondre "aux besoins de la population face à la fermeture des cabinets médicaux et d'éviter l'engorgement des urgences du CHU", note-t-on. L'agence a notamment précisé un calendrier de réouverture des maisons médicales de garde, qui avaient été exceptionnellement fermées jeudi.

Sur le plan de l'approvisionnement, notamment en médicaments, "on a eu des difficultés et c'est à surveiller tous les jours", a complété Jérôme Le Brière, mentionnant des préoccupations importantes sur cet aspect.

"On est en relation directe avec le port, l'aéroport, Air France, Géodis, nos transitaires, parce qu'il y a eu des soucis la dernière semaine." Sur certains produits, "on a une autonomie de trois jours, d'autres de 10 jours, d'autres de 15 jours, c'est important de l'avoir à l'esprit", a-t-il précisé.

Le CHU a notamment dû faire face samedi à un problème de "containers bloqués au port".

Dans un communiqué diffusé lundi, la préfecture de Martinique a fait savoir que la "nuit du 14 au 15 octobre a été calme sur l'ensemble du territoire", mais que les forces de l'ordre restaient mobilisées.

Les mesures de couvre-feu ont été prolongées jusqu’au lundi 21 octobre.

Dans un communiqué diffusé vendredi, l'union régionale des médecins libéraux de Martinique (URML) a alerté "la ministre de la santé et de l'accès aux soins et les autorités sur la nécessité de tout mettre en œuvre pour un retour au calme sur le territoire, afin que la continuité des soins et l'accès aux soins de la population soient préservés".

Elle a déclaré apporter "son entier soutien aux médecins, à l'ensemble des soignants, notamment les pharmaciens, dans un contexte où une pharmacie a été incendiée [dans la nuit de jeudi] au Carbet".

Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de l'accès aux soins, a déclaré vendredi soir dans un post sur X apporter son "plein soutien aux professionnels de santé martiniquais", précisant que le ministère se tenait "à leurs côtés dans ces circonstances difficiles".

mlb/ab/APMnews

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(Par Maryannick LE BRIS)

FORT-DE-FRANCE, 16 octobre 2024 (APMnews) - Face aux mouvements sociaux sur le territoire, les équipes du CHU de Martinique se sont organisées pour assurer la continuité des services, ont expliqué Jérôme Le Brière, directeur général de l'établissement, et le Dr Albert Brizio, médecin urgentiste, lundi soir lors d'un entretien à APMnews.

"Au regard des nuitées de mercredi soir et de jeudi soir", où les tensions sociales dans le contexte du mouvement "contre la vie chère" se sont accrues en Martinique, "on a voulu déclencher le plan blanc et on s'est mis en ordre de bataille pour ajuster nos organisations, notre fonctionnement", a expliqué Jérôme Le Brière (cf dépêche du 11/10/2024 à 18:34).

Compte tenu de la situation, "que nous ne maîtrisons pas, et de la négociation encore en cours [entre l'Etat, les élus, le collectif à l'origine du mouvement et les acteurs économiques], il s'agit pour nous de garantir une qualité de prise en charge, des conditions de travail et une circulation de nos professionnels optimales", a souligné le directeur général du CHU. "On ne part pas dans l'idée de lever le plan blanc cette semaine", a-t-il ajouté.

Il a relaté des difficultés importantes pour se rendre au CHU, apparues "jeudi et vendredi", à la fois pour les professionnels et les patients, en raison des barrages. L'établissement a fait en sorte de "faciliter le fait que les professionnels arrivent 2, voire 3 heures avant leur prise de poste", avec des systèmes de relève. Ils "l'ont fait de façon vraiment volontariste", a-t-il souligné.

"Avec le président de la CME [commission médicale d'établissement], nous souhaitons saluer fortement la mobilisation de l'ensemble des professionnels de santé, qui prouvent vraiment qu'ils ont le sens du service public chevillé au corps", a insisté Jérôme Le Brière.

Dans le cadre de cette "gestion de crise", c'est un "esprit collectif qui se met en place", a-t-il encore relaté, évoquant un taux d'absentéisme qui n'est pas parti à la hausse et un taux de grévistes limité.

"Après trois, quatre ou cinq nuits à plus de 12 heures en amplitude horaire, entre le départ de leur domicile et le retour à domicile", les équipes "commencent à être fatiguées, la corde est tendue", a-t-il témoigné.

"On essaie de faciliter le fait que certains professionnels dorment sur site, la prise de repas, de rassurer sur le fait que toute heure faite au CHU" dans le cadre de cette organisation "sera payée en heure supplémentaire", a précisé Jérôme Le Brière.

S'agissant des patients, les médecins ont été "très vigilants au fait de ne pas déprogrammer, notamment en cancérologie ou des soins de semi-urgence". Il n'y a donc pas eu de "déprogrammations massives", notamment "parce que les professionnels étaient là, les blocs étaient ouverts", et "tout ce qui a été déprogrammé", notamment en raison des difficultés pour les patients de se rendre sur place, "a été reprogrammé".

"A l'heure où on se parle, les barrages sont moins nombreux qu'il y a trois ou quatre jours", a souligné Jérôme Le Brière lundi, précisant que le contexte invitait à la prudence quant à l'évolution de la situation.

"Ma priorité, ce sont les patients et les équipes", a-t-il pointé. "On reste mobilisés et le message que je veux faire passer assez fortement, qui est entendu par le plus grand nombre, c'est : sanctuarisons notre CHU, nos soignants, nos patients".

Pas d'accroissement d'appels au 15

Pour l'heure, les impacts sont difficiles "à quantifier", a estimé le directeur général du CHU, précisant vouloir analyser "à froid et objectivement", par un retour d'expérience, les incidences de ces perturbations sur la continuité des soins.

Il s'agit d'analyser les incidences "pour les patients qui de fait n'ont pas pu venir et n'ont pas pu honorer leurs rendez-vous", des déprogrammations qui ont eu lieu "vendredi, samedi et lundi", "les éventuelles pertes de chance", ainsi que l'organisation des relations avec les autorités pendant cette période, a détaillé Jérôme Le Brière.

"On sait que le ministère est pleinement mobilisé à nos côtés, que l'ARS [agence régionale de santé] nous soutient au quotidien", a-t-il relevé. Un appel à la réserve sanitaire pourrait permettre l'arrivée de quelques professionnels médicaux "ces jours-ci".

"Il n'y a pas eu d'accroissement important du nombre d'appels au 15" car "la population a, très bien compris qu’il fallait appeler uniquement quand c'était vraiment nécessaire", a rapporté le Dr Brizio.

"Le Samu, jusqu'à maintenant, a pu assurer la continuité du service auprès de la population, toutes les missions ont pu être exécutées", même si les accès ont "parfois été rendus difficiles, à cause des obstacles qui empêchaient de passer ou qui ralentissaient le passage, ce qui bien sûr induit des retards".

"Nous avons autant que possible essayé de surmonter ces obstacles au moment où ils étaient le plus importants", y compris en recourant à des hélicoptères, a-t-il témoigné. "La situation a été gérée, il n'y a pas eu des conséquences dramatiques" de ces entraves à la circulation.

L'ARS Martinique a annoncé samedi des mesures pour maintenir "une permanence des soins efficace" durant le week-end, afin de répondre "aux besoins de la population face à la fermeture des cabinets médicaux et d'éviter l'engorgement des urgences du CHU", note-t-on. L'agence a notamment précisé un calendrier de réouverture des maisons médicales de garde, qui avaient été exceptionnellement fermées jeudi.

Sur le plan de l'approvisionnement, notamment en médicaments, "on a eu des difficultés et c'est à surveiller tous les jours", a complété Jérôme Le Brière, mentionnant des préoccupations importantes sur cet aspect.

"On est en relation directe avec le port, l'aéroport, Air France, Géodis, nos transitaires, parce qu'il y a eu des soucis la dernière semaine." Sur certains produits, "on a une autonomie de trois jours, d'autres de 10 jours, d'autres de 15 jours, c'est important de l'avoir à l'esprit", a-t-il précisé.

Le CHU a notamment dû faire face samedi à un problème de "containers bloqués au port".

Dans un communiqué diffusé lundi, la préfecture de Martinique a fait savoir que la "nuit du 14 au 15 octobre a été calme sur l'ensemble du territoire", mais que les forces de l'ordre restaient mobilisées.

Les mesures de couvre-feu ont été prolongées jusqu’au lundi 21 octobre.

Dans un communiqué diffusé vendredi, l'union régionale des médecins libéraux de Martinique (URML) a alerté "la ministre de la santé et de l'accès aux soins et les autorités sur la nécessité de tout mettre en œuvre pour un retour au calme sur le territoire, afin que la continuité des soins et l'accès aux soins de la population soient préservés".

Elle a déclaré apporter "son entier soutien aux médecins, à l'ensemble des soignants, notamment les pharmaciens, dans un contexte où une pharmacie a été incendiée [dans la nuit de jeudi] au Carbet".

Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de l'accès aux soins, a déclaré vendredi soir dans un post sur X apporter son "plein soutien aux professionnels de santé martiniquais", précisant que le ministère se tenait "à leurs côtés dans ces circonstances difficiles".

mlb/ab/APMnews

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