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02/12 2024
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LIEN SOCIAL ET RECUEIL DE LA PAROLE DES PATIENTS: LES ÉTABLISSEMENTS ONT PLUSIEURS OUTILS À LEUR DISPOSITION (CHRISTIAN SAOUT)

(Par Sabine NEULAT-ISARD, aux Journées nationales du Syncass-CFDT)

ANGERS, 2 décembre 2024 (APMnews) - Les établissements de santé ont différents outils à leur disposition pour maintenir ou créer un lien social avec les patients, mais qui ne sont pas toujours très connus, a souligné Christian Saout, président de la commission en charge du social et du médico-social et président du conseil pour l'engagement des usagers à la Haute autorité de santé (HAS), lors des journées annuelles du Syncass-CFDT qui se sont déroulées à Angers en fin de semaine dernière.

"On n'est pas sans outils pour créer ou recréer du lien social, mais ils ne sont parfois pas activés, pas connus, ou pâtissent de difficultés", a expliqué Christian Saout, lors du congrès du Syncass-CFDT qui avait pour thème "Epidémie de solitude, que reste-t-il du lien social?".

Il a pris l'exemple de la "consultation d'annonce" lors d'une maladie grave, comme un cancer. Alors que cet outil a "été pensé, discuté avec les personnes concernées, puis mis sous la forme d'un décret" et qu'"on est un des rares pays à l'avoir mis en place", il "n'est pas forcément entré dans les pratiques". "C'est dommage qu'il ne soit pas toujours utilisé", a-t-il déploré.

Parmi les autres outils à la disposition des professionnels, figurent ceux pour "l'aide à la décision partagée en santé", par exemple pour choisir un traitement en fonction de ses préférences et contraintes personnelles, a poursuivi Christian Saout.

Mais là encore, ils ne sont pas très utilisés, a déploré Christian Saout, qui a cité l'outil sur la reconstruction mammaire après une chirurgie du cancer du sein qui a été publié récemment par la HAS, après avoir été élaboré avec des femmes concernées.

"Il y a beaucoup d'aides à la décision qui sont des supports papiers mais ils ne sont pas à donner aux gens. Ils sont à discuter avec eux. Ce sont des guides pour l'entretien et pour faire venir la personne vers sa thérapeutique", a-t-il insisté.

Comme autres outils, il a évoqué "l'approche motivationnelle", qui est une logique pour aider quelqu'un à modifier un comportement qui est préjudiciable à sa santé en vue de protéger les capacités subsistantes après une maladie. Ces outils relèvent de la formation et constituent une méthodologie d'accompagnement des personnes, a souligné le représentant de la HAS.

Il existe également des outils "plus récents", comme la "santé narrative", qui préconisent de "passer par le récit personnel à partager avec un tiers, pour faire un point sur soi, améliorer la qualité des soins et renforcer le pouvoir d'agir des personnes". Ce type de techniques peut paraître "étrange" mais "parfois le fait de mettre sur le papier ce qu'il vous arrive, dans un pépin de santé ou dans la vie, peut permettre de mettre de la distance et de pouvoir interagir avec des tiers pour discuter de l'événement", a-t-il expliqué.

La santé narrative peut prendre des aspects et objectifs "très divers", "de force en soi" ou pour "améliorer la qualité des soins". "Cela donne des cartes aux personnes pour renforcer leur pouvoir d'agir", a-t-il assuré.

Si "tous ces outils sont considérables pour renforcer le lien social", ils ne marchent "que si les professionnels du soin respectent le savoir expérientiel des patients", a insisté Christian Saout. "Certes, ce sont des savoirs construits différemment, mais ce sont des savoirs quand même et ils doivent être respectés", a-t-il affirmé en indiquant que cet aspect était "très important" pour la HAS.

Prochaine recommandation de la HAS sur le recours aux pairs-aidants

Les établissements ont aussi des outils "de dialogue", comme les "focus-groupes, qui sont très courants".

D'autres approches "se professionnalisent", comme celle des pairs-aidants qui étaient des bénévoles et sont aujourd'hui recrutés par les établissements et parfois rémunérés comme des professionnels, en particulier dans la santé mentale, mais aussi dans le domaine du soin, comme certaines pathologies chroniques ou les cancers, a constaté Christian Saout. Il a annoncé que la HAS publierait prochainement une recommandation de bonnes pratiques sur le recours aux pairs-aidants.

C'est aussi le cas des médiateurs de santé qui, eux, ont eu une reconnaissance légale dans la loi du 26 janvier 2016 (loi "Touraine"). Ce sont "des facilitateurs pour permettre à toute personne, quelle que soit sa difficulté, de trouver une aide pour se repérer et user au mieux des ressources dans le système de santé qui peuvent lui être profitables".

La médiation en santé est de plus en plus éprouvée et promue pour améliorer l'accès à la santé des plus vulnérables, mais manque encore d'un cadrage national pour la soutenir et la sécuriser, ont relevé des experts lors de tables rondes organisées à Paris la semaine dernière, note-t-on (cf dépêche du 02/12/2024 à 15:26).

D'autres approches "s'institutionnalisent", comme "l'éducation thérapeutique du patient qui figurait dans la loi 'hôpital, patients, santé, territoires' (HPST) et s'est développée de manière extrêmement forte en France", a poursuivi Christian Saout.

"Je pensais que le cadre légal qui a été fixé à travers des décrets, arrêtés et circulaires, allait casser tout cela mais finalement cette approche d'éducation thérapeutique a bien résisté et se déploie sous la forme de programmes parfois coconstruits avec les personnes concernées, qui prennent des patients comme intervenants", a observé Christian Saout. Il a précisé que ce développement concernait autant le système de soin que les associations d'usagers.

"Certaines formes de participation ont aussi fait l'objet d'une obligation légale", a ajouté Christian Saout en mentionnant la commission des usagers (CDU), le conseil de la vie sociale (CVS), ou les projets d'hébergement des personnes.

"Mais dans les établissements, on ne comprend pas bien qu'on peut faire les deux, ce qui est obligatoire et ce qui est volontaire." Par exemple, il n'y a "pas de décret sur les focus-groupes, ce n'est pas pour cela qu'il ne faut pas les faire".

Tous ces outils "aident beaucoup le lien social et permettent de redonner un coup de peps au professionnel de santé qui est parfois en difficulté", a-t-il insisté.

Plusieurs outils pour parvenir ensuite à améliorer le système

Il existe aussi des outils qui visent à aider les professionnels à améliorer le système de santé.

"Il y a aujourd'hui beaucoup d'outils de recueil de la parole des personnes qui mériteraient d'être utilisés mieux qu'ils ne le sont aujourd'hui", a estimé Christian Saout. Il a cité l'outil "e-Satis" (dispositif national de mesure de la satisfaction et de l'expérience des patients hospitalisés) mais qui rencontre "un problème d'exhaustivité puisque seulement 30% des patients le renseignent". "On peut l'améliorer mais on peut s'enorgueillir d'être un des rares pays à disposer d'un outil de recueil de la satisfaction des patients", a-t-il assuré.

Il a rappelé que la HAS avait annoncé en octobre le développement d'un nouvel outil de restitution aux établissements de santé de tous les résultats issus d'e-Satis, en partenariat avec les Hospices civils de Lyon (HCL). Cette plateforme web, construite avec un groupe d'usagers et de professionnels de la qualité et de la sécurité des soins, propose notamment un algorithme d'intelligence artificielle qui classe automatiquement les commentaires libres des patients (verbatims) pour faciliter leur analyse, rappelle-t-on.

Les établissements disposent aussi d'outils allant avec la certification, comme le patient-traceur, ou doivent respecter la nouvelle obligation légale du recueil de la parole en Ehpad. "On peut faire quelque chose avec tout cela, pour voir comment collectivement on peut améliorer la qualité du système de santé", a affirmé Christian Saout.

L'intervenant a cité d'autres outils, comme les questionnaires "Prems" (patient-reported expérience measures qui mesurent l'expérience des soins vécus par les patients) et les "Proms" ou simplement les retours d'expériences, a insisté sur le fait que ces démarches ne fonctionnaient que si elles restent "descendantes".

"Si on donne des questionnaires sans les construire avec les personnes et sans leur faire un retour des résultats", "ça ne sert à rien, de même que s'il n'y a pas d'actions correctrices ensuite", a-t-il affirmé.

Interrogé par Jean-François Cibien, médecin urgentiste, sur la construction par la HAS d'un indicateur sur les patients qui demeurent longtemps sur un brancard aux urgences, Christian Saout a annoncé que la Haute autorité avait été saisie d'une demande d'étude d'indicateurs sur les urgences. "On devrait publier la note de cadrage très bientôt."

san/ab/APMnews

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(Par Sabine NEULAT-ISARD, aux Journées nationales du Syncass-CFDT)

ANGERS, 2 décembre 2024 (APMnews) - Les établissements de santé ont différents outils à leur disposition pour maintenir ou créer un lien social avec les patients, mais qui ne sont pas toujours très connus, a souligné Christian Saout, président de la commission en charge du social et du médico-social et président du conseil pour l'engagement des usagers à la Haute autorité de santé (HAS), lors des journées annuelles du Syncass-CFDT qui se sont déroulées à Angers en fin de semaine dernière.

"On n'est pas sans outils pour créer ou recréer du lien social, mais ils ne sont parfois pas activés, pas connus, ou pâtissent de difficultés", a expliqué Christian Saout, lors du congrès du Syncass-CFDT qui avait pour thème "Epidémie de solitude, que reste-t-il du lien social?".

Il a pris l'exemple de la "consultation d'annonce" lors d'une maladie grave, comme un cancer. Alors que cet outil a "été pensé, discuté avec les personnes concernées, puis mis sous la forme d'un décret" et qu'"on est un des rares pays à l'avoir mis en place", il "n'est pas forcément entré dans les pratiques". "C'est dommage qu'il ne soit pas toujours utilisé", a-t-il déploré.

Parmi les autres outils à la disposition des professionnels, figurent ceux pour "l'aide à la décision partagée en santé", par exemple pour choisir un traitement en fonction de ses préférences et contraintes personnelles, a poursuivi Christian Saout.

Mais là encore, ils ne sont pas très utilisés, a déploré Christian Saout, qui a cité l'outil sur la reconstruction mammaire après une chirurgie du cancer du sein qui a été publié récemment par la HAS, après avoir été élaboré avec des femmes concernées.

"Il y a beaucoup d'aides à la décision qui sont des supports papiers mais ils ne sont pas à donner aux gens. Ils sont à discuter avec eux. Ce sont des guides pour l'entretien et pour faire venir la personne vers sa thérapeutique", a-t-il insisté.

Comme autres outils, il a évoqué "l'approche motivationnelle", qui est une logique pour aider quelqu'un à modifier un comportement qui est préjudiciable à sa santé en vue de protéger les capacités subsistantes après une maladie. Ces outils relèvent de la formation et constituent une méthodologie d'accompagnement des personnes, a souligné le représentant de la HAS.

Il existe également des outils "plus récents", comme la "santé narrative", qui préconisent de "passer par le récit personnel à partager avec un tiers, pour faire un point sur soi, améliorer la qualité des soins et renforcer le pouvoir d'agir des personnes". Ce type de techniques peut paraître "étrange" mais "parfois le fait de mettre sur le papier ce qu'il vous arrive, dans un pépin de santé ou dans la vie, peut permettre de mettre de la distance et de pouvoir interagir avec des tiers pour discuter de l'événement", a-t-il expliqué.

La santé narrative peut prendre des aspects et objectifs "très divers", "de force en soi" ou pour "améliorer la qualité des soins". "Cela donne des cartes aux personnes pour renforcer leur pouvoir d'agir", a-t-il assuré.

Si "tous ces outils sont considérables pour renforcer le lien social", ils ne marchent "que si les professionnels du soin respectent le savoir expérientiel des patients", a insisté Christian Saout. "Certes, ce sont des savoirs construits différemment, mais ce sont des savoirs quand même et ils doivent être respectés", a-t-il affirmé en indiquant que cet aspect était "très important" pour la HAS.

Prochaine recommandation de la HAS sur le recours aux pairs-aidants

Les établissements ont aussi des outils "de dialogue", comme les "focus-groupes, qui sont très courants".

D'autres approches "se professionnalisent", comme celle des pairs-aidants qui étaient des bénévoles et sont aujourd'hui recrutés par les établissements et parfois rémunérés comme des professionnels, en particulier dans la santé mentale, mais aussi dans le domaine du soin, comme certaines pathologies chroniques ou les cancers, a constaté Christian Saout. Il a annoncé que la HAS publierait prochainement une recommandation de bonnes pratiques sur le recours aux pairs-aidants.

C'est aussi le cas des médiateurs de santé qui, eux, ont eu une reconnaissance légale dans la loi du 26 janvier 2016 (loi "Touraine"). Ce sont "des facilitateurs pour permettre à toute personne, quelle que soit sa difficulté, de trouver une aide pour se repérer et user au mieux des ressources dans le système de santé qui peuvent lui être profitables".

La médiation en santé est de plus en plus éprouvée et promue pour améliorer l'accès à la santé des plus vulnérables, mais manque encore d'un cadrage national pour la soutenir et la sécuriser, ont relevé des experts lors de tables rondes organisées à Paris la semaine dernière, note-t-on (cf dépêche du 02/12/2024 à 15:26).

D'autres approches "s'institutionnalisent", comme "l'éducation thérapeutique du patient qui figurait dans la loi 'hôpital, patients, santé, territoires' (HPST) et s'est développée de manière extrêmement forte en France", a poursuivi Christian Saout.

"Je pensais que le cadre légal qui a été fixé à travers des décrets, arrêtés et circulaires, allait casser tout cela mais finalement cette approche d'éducation thérapeutique a bien résisté et se déploie sous la forme de programmes parfois coconstruits avec les personnes concernées, qui prennent des patients comme intervenants", a observé Christian Saout. Il a précisé que ce développement concernait autant le système de soin que les associations d'usagers.

"Certaines formes de participation ont aussi fait l'objet d'une obligation légale", a ajouté Christian Saout en mentionnant la commission des usagers (CDU), le conseil de la vie sociale (CVS), ou les projets d'hébergement des personnes.

"Mais dans les établissements, on ne comprend pas bien qu'on peut faire les deux, ce qui est obligatoire et ce qui est volontaire." Par exemple, il n'y a "pas de décret sur les focus-groupes, ce n'est pas pour cela qu'il ne faut pas les faire".

Tous ces outils "aident beaucoup le lien social et permettent de redonner un coup de peps au professionnel de santé qui est parfois en difficulté", a-t-il insisté.

Plusieurs outils pour parvenir ensuite à améliorer le système

Il existe aussi des outils qui visent à aider les professionnels à améliorer le système de santé.

"Il y a aujourd'hui beaucoup d'outils de recueil de la parole des personnes qui mériteraient d'être utilisés mieux qu'ils ne le sont aujourd'hui", a estimé Christian Saout. Il a cité l'outil "e-Satis" (dispositif national de mesure de la satisfaction et de l'expérience des patients hospitalisés) mais qui rencontre "un problème d'exhaustivité puisque seulement 30% des patients le renseignent". "On peut l'améliorer mais on peut s'enorgueillir d'être un des rares pays à disposer d'un outil de recueil de la satisfaction des patients", a-t-il assuré.

Il a rappelé que la HAS avait annoncé en octobre le développement d'un nouvel outil de restitution aux établissements de santé de tous les résultats issus d'e-Satis, en partenariat avec les Hospices civils de Lyon (HCL). Cette plateforme web, construite avec un groupe d'usagers et de professionnels de la qualité et de la sécurité des soins, propose notamment un algorithme d'intelligence artificielle qui classe automatiquement les commentaires libres des patients (verbatims) pour faciliter leur analyse, rappelle-t-on.

Les établissements disposent aussi d'outils allant avec la certification, comme le patient-traceur, ou doivent respecter la nouvelle obligation légale du recueil de la parole en Ehpad. "On peut faire quelque chose avec tout cela, pour voir comment collectivement on peut améliorer la qualité du système de santé", a affirmé Christian Saout.

L'intervenant a cité d'autres outils, comme les questionnaires "Prems" (patient-reported expérience measures qui mesurent l'expérience des soins vécus par les patients) et les "Proms" ou simplement les retours d'expériences, a insisté sur le fait que ces démarches ne fonctionnaient que si elles restent "descendantes".

"Si on donne des questionnaires sans les construire avec les personnes et sans leur faire un retour des résultats", "ça ne sert à rien, de même que s'il n'y a pas d'actions correctrices ensuite", a-t-il affirmé.

Interrogé par Jean-François Cibien, médecin urgentiste, sur la construction par la HAS d'un indicateur sur les patients qui demeurent longtemps sur un brancard aux urgences, Christian Saout a annoncé que la Haute autorité avait été saisie d'une demande d'étude d'indicateurs sur les urgences. "On devrait publier la note de cadrage très bientôt."

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