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28/05 2024
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LES INFECTIONS À CHLAMYDIA PLUS FRÉQUENTES CHEZ LES JEUNES ET CHEZ LES FEMMES HOMO ET BISEXUELLES

(Par Sylvie BURNOUF, aux Journées thématiques santé sexuelle 2024)

PARIS, 28 mai 2024 (APMnews) - La prévalence relativement faible des infections à Chlamydia trachomatis en France métropolitaine, de moins de 1% en 2023 chez les adultes de 18-59 ans, cache en réalité d'importantes disparités selon l'âge, l'orientation sexuelle et le nombre de partenaires, révèlent les premiers résultats de l'enquête PrévIST 2023 présentés mardi aux Journées thématiques santé sexuelle 2024, organisées à Paris.

Claire Sauvage, chargée d'études scientifiques chez Santé publique France (SPF), a prévenu que les résultats de cette enquête nationale de prévalence des infections sexuellement transmissibles (IST) étaient "préliminaires", les équipes n'ayant "pas encore eu le temps de tout fouiller" dans les bases de données "reçues la semaine dernière".

Elle a expliqué que l'étude PrévIST était adossée à l'enquête Contexte des sexualités en France (CSF) 2023, qui est conduite par l'Inserm pour documenter "les pratiques sexuelles et préventives" de la population générale des 15-89 ans.

Les participants de 18-59 ans ayant déclaré avoir déjà eu un rapport sexuel au cours de leur vie se sont ainsi vu proposer de recevoir un kit d'autoprélèvement à domicile pour le dépistage de trois IST (infections à Chlamydia trachomatis, Neisseria gonorrhoeae et Mycoplasma genitalium).

L'objectif était d'estimer la prévalence de ces infections en population générale, leurs facteurs de risque ainsi que le recours au dépistage. Les données ont été redressées sur les variables sociodémographiques et les indicateurs de santé sexuelle, ce qui permet d'avoir des résultats représentatifs des personnes de 18-59 ans, vivant en France et ayant déjà eu un rapport sexuel au cours de la vie, a fait valoir Claire Sauvage.

L'enquête CSF menée entre novembre 2022 et décembre 2023 a permis d'inclure 21.259 participants, parmi lesquels 13.686 étaient éligibles à PrévIST. Les deux tiers ont accepté de recevoir le kit d'autoprélèvement, et environ la moitié d'entre eux ont renvoyé les échantillons au Centre national de référence (CNR) des IST bactériennes, soit un "taux d'acceptation global" de 36%.

L'analyse des 4.872 échantillons reçus (autoprélèvement vaginal pour les femmes, premier jet urinaire pour les hommes) a permis de détecter 32 cas d'infection à Chlamydia, 1 cas d'infection à gonocoques et 71 cas d'infections à mycoplasmes.

Concernant les infections à Chlamydia, la prévalence globale était de 0,6% chez les hommes (10 cas) et de 0,9% chez les femmes (22 cas). Elle diminuait avec l'âge, passant d'environ 2% chez les 18-29 ans (1,9% chez les hommes et 2,2% chez les femmes) à moins de 0,2% chez les 50-59 ans (0,03% chez les hommes et 0,23% chez les femmes).

La prévalence dépendait fortement de l'orientation sexuelle, puisqu'elle était chez les femmes de 7,4% chez les homo/bisexuelles contre 0,6% chez les hétérosexuelles, et que chez les hommes, elle était de 4,1% chez des gays/bisexuels et de 0,35% chez les hétérosexuels. Le taux dépendait aussi beaucoup du nombre de partenaires sexuels au cours de 12 derniers mois: avec deux partenaires ou plus, la prévalence atteignait 1,5% chez les femmes et 2,9% chez les hommes, tandis qu'avec un seul partenaire elle était respectivement de 1% et 0,06%, et avec zéro partenaire, de 0,2% et 0%.

La prévalence de l'infection à Chlamydia trachomatis est "plus faible qu'attendue", au vu du contexte actuel d'augmentation des IST (cf dépêche du 28/11/2023 à 19:12), a pointé Claire Sauvage, rappelant qu'une étude comparable menée en 2006 (NatChla) avait révélé une prévalence de 1,4% chez les femmes et de 1,6% chez les hommes.

Cela peut s'expliquer par le fait que cette infection circule principalement "dans les populations les plus exposées (notamment celles ayant eu deux partenaires sexuels ou plus dans l'année)" et qu'elle est "difficile à détecter en population générale", a ajouté la chercheuse.

Les infections à mycoplasmes fréquentes chez les femmes multipartenaires

PrévIST a également permis de fournir les premiers résultats de prévalence disponibles en France pour les infections à Mycoplasma genitalium, qui semblent "assez comparables à ceux disponibles dans d'autres pays", a noté Claire Sauvage.

La prévalence était ainsi de 1,3% chez les hommes et de 3% chez les femmes. La tranche d'âge la plus touchée était celle des 30-39 ans, avec 3,4% chez les hommes et 5,4% chez les femmes. Si les hommes gays/bisexuels étaient plus touchés que les hétérosexuels (4,9% vs 1%), c'est l'inverse qui était observé chez les femmes (1,2% chez les homo/bisexuelles vs 3,2% chez les hétérosexuelles).

La prévalence des infections à Mycoplasma genitalium était particulièrement élevée (13%) chez les femmes ayant eu au moins deux partenaires sexuels dans l'année. Dans les autres populations -les hommes avec au moins deux partenaires sexuels et les hommes et femmes avec zéro ou un partenaire-, elle oscillait entre 0,9% et 2,2%.

La prévalence des infections à gonocoques n'a pas pu être estimée puisque seul un cas a été détecté, chez un homme de 50-59 ans homo/bisexuel et ayant eu au moins deux partenaires dans l'année.

Claire Sauvage a par ailleurs estimé, en réponse à une question de l'auditoire, que pour des raisons d'acceptabilité, il aurait été trop compliqué de solliciter des autoprélèvements anaux ou oropharyngés dans le cadre de cette étude menée en population générale. Elle a aussi fait valoir que le protocole avait été considéré, après discussion avec le CNR, comme "assez sensible pour tester la prévalence".

A noter que l'étude vise aussi à documenter la résistance des souches de Neisseria gonorrhoeae et de Mycoplasma genitalium, à avoir des données de typage pour Chlamydia trachomatis, à estimer la prévalence des infections à papillomavirus humains (HPV) chez les 18-29 ans et à mesurer l'efficacité des vaccins anti-HPV. Ces points seront analysés prochainement.

Présente pour l'ouverture des Journées thématiques, la directrice générale de SPF, Caroline Semaille, a notamment fait savoir que l'agence prévoyait une campagne de communication "à la rentrée" pour promouvoir le dépistage des IST tous les trois mois chez les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH) multipartenaires, campagne qui "sera répétée dans le temps pour accompagner la répétition de ces dépistages".

Elle a profité de son intervention devant cet auditoire truffé de professionnels de santé, en particulier d'infectiologues, pour lancer un "appel à volontaires" pour "aller aider à Mayotte" dans le cadre de la réserve sanitaire, alors que l'archipel est touché par "une crise de l'eau et une épidémie de choléra" (cf dépêche du 22/05/2024 à 15:07 et dépêche du 06/11/2023 à 15:47). Elle a précisé que 50 à 60 personnes étaient "envoyées" toutes les trois semaines pour "vacciner et détecter les cas de choléra". "Médecins, pharmaciens, infirmières, logisticiens", "vieux et jeunes"… tout le monde est invité à s'inscrire à la réserve sanitaire.

Selon les données de l'agence régionale de santé (ARS) Mayotte arrêtées à lundi, 122 cas de choléra dont deux décès ont été recensés sur l'archipel depuis le début de l'alerte, mi-mars.

sb/ab/APMnews

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(Par Sylvie BURNOUF, aux Journées thématiques santé sexuelle 2024)

PARIS, 28 mai 2024 (APMnews) - La prévalence relativement faible des infections à Chlamydia trachomatis en France métropolitaine, de moins de 1% en 2023 chez les adultes de 18-59 ans, cache en réalité d'importantes disparités selon l'âge, l'orientation sexuelle et le nombre de partenaires, révèlent les premiers résultats de l'enquête PrévIST 2023 présentés mardi aux Journées thématiques santé sexuelle 2024, organisées à Paris.

Claire Sauvage, chargée d'études scientifiques chez Santé publique France (SPF), a prévenu que les résultats de cette enquête nationale de prévalence des infections sexuellement transmissibles (IST) étaient "préliminaires", les équipes n'ayant "pas encore eu le temps de tout fouiller" dans les bases de données "reçues la semaine dernière".

Elle a expliqué que l'étude PrévIST était adossée à l'enquête Contexte des sexualités en France (CSF) 2023, qui est conduite par l'Inserm pour documenter "les pratiques sexuelles et préventives" de la population générale des 15-89 ans.

Les participants de 18-59 ans ayant déclaré avoir déjà eu un rapport sexuel au cours de leur vie se sont ainsi vu proposer de recevoir un kit d'autoprélèvement à domicile pour le dépistage de trois IST (infections à Chlamydia trachomatis, Neisseria gonorrhoeae et Mycoplasma genitalium).

L'objectif était d'estimer la prévalence de ces infections en population générale, leurs facteurs de risque ainsi que le recours au dépistage. Les données ont été redressées sur les variables sociodémographiques et les indicateurs de santé sexuelle, ce qui permet d'avoir des résultats représentatifs des personnes de 18-59 ans, vivant en France et ayant déjà eu un rapport sexuel au cours de la vie, a fait valoir Claire Sauvage.

L'enquête CSF menée entre novembre 2022 et décembre 2023 a permis d'inclure 21.259 participants, parmi lesquels 13.686 étaient éligibles à PrévIST. Les deux tiers ont accepté de recevoir le kit d'autoprélèvement, et environ la moitié d'entre eux ont renvoyé les échantillons au Centre national de référence (CNR) des IST bactériennes, soit un "taux d'acceptation global" de 36%.

L'analyse des 4.872 échantillons reçus (autoprélèvement vaginal pour les femmes, premier jet urinaire pour les hommes) a permis de détecter 32 cas d'infection à Chlamydia, 1 cas d'infection à gonocoques et 71 cas d'infections à mycoplasmes.

Concernant les infections à Chlamydia, la prévalence globale était de 0,6% chez les hommes (10 cas) et de 0,9% chez les femmes (22 cas). Elle diminuait avec l'âge, passant d'environ 2% chez les 18-29 ans (1,9% chez les hommes et 2,2% chez les femmes) à moins de 0,2% chez les 50-59 ans (0,03% chez les hommes et 0,23% chez les femmes).

La prévalence dépendait fortement de l'orientation sexuelle, puisqu'elle était chez les femmes de 7,4% chez les homo/bisexuelles contre 0,6% chez les hétérosexuelles, et que chez les hommes, elle était de 4,1% chez des gays/bisexuels et de 0,35% chez les hétérosexuels. Le taux dépendait aussi beaucoup du nombre de partenaires sexuels au cours de 12 derniers mois: avec deux partenaires ou plus, la prévalence atteignait 1,5% chez les femmes et 2,9% chez les hommes, tandis qu'avec un seul partenaire elle était respectivement de 1% et 0,06%, et avec zéro partenaire, de 0,2% et 0%.

La prévalence de l'infection à Chlamydia trachomatis est "plus faible qu'attendue", au vu du contexte actuel d'augmentation des IST (cf dépêche du 28/11/2023 à 19:12), a pointé Claire Sauvage, rappelant qu'une étude comparable menée en 2006 (NatChla) avait révélé une prévalence de 1,4% chez les femmes et de 1,6% chez les hommes.

Cela peut s'expliquer par le fait que cette infection circule principalement "dans les populations les plus exposées (notamment celles ayant eu deux partenaires sexuels ou plus dans l'année)" et qu'elle est "difficile à détecter en population générale", a ajouté la chercheuse.

Les infections à mycoplasmes fréquentes chez les femmes multipartenaires

PrévIST a également permis de fournir les premiers résultats de prévalence disponibles en France pour les infections à Mycoplasma genitalium, qui semblent "assez comparables à ceux disponibles dans d'autres pays", a noté Claire Sauvage.

La prévalence était ainsi de 1,3% chez les hommes et de 3% chez les femmes. La tranche d'âge la plus touchée était celle des 30-39 ans, avec 3,4% chez les hommes et 5,4% chez les femmes. Si les hommes gays/bisexuels étaient plus touchés que les hétérosexuels (4,9% vs 1%), c'est l'inverse qui était observé chez les femmes (1,2% chez les homo/bisexuelles vs 3,2% chez les hétérosexuelles).

La prévalence des infections à Mycoplasma genitalium était particulièrement élevée (13%) chez les femmes ayant eu au moins deux partenaires sexuels dans l'année. Dans les autres populations -les hommes avec au moins deux partenaires sexuels et les hommes et femmes avec zéro ou un partenaire-, elle oscillait entre 0,9% et 2,2%.

La prévalence des infections à gonocoques n'a pas pu être estimée puisque seul un cas a été détecté, chez un homme de 50-59 ans homo/bisexuel et ayant eu au moins deux partenaires dans l'année.

Claire Sauvage a par ailleurs estimé, en réponse à une question de l'auditoire, que pour des raisons d'acceptabilité, il aurait été trop compliqué de solliciter des autoprélèvements anaux ou oropharyngés dans le cadre de cette étude menée en population générale. Elle a aussi fait valoir que le protocole avait été considéré, après discussion avec le CNR, comme "assez sensible pour tester la prévalence".

A noter que l'étude vise aussi à documenter la résistance des souches de Neisseria gonorrhoeae et de Mycoplasma genitalium, à avoir des données de typage pour Chlamydia trachomatis, à estimer la prévalence des infections à papillomavirus humains (HPV) chez les 18-29 ans et à mesurer l'efficacité des vaccins anti-HPV. Ces points seront analysés prochainement.

Présente pour l'ouverture des Journées thématiques, la directrice générale de SPF, Caroline Semaille, a notamment fait savoir que l'agence prévoyait une campagne de communication "à la rentrée" pour promouvoir le dépistage des IST tous les trois mois chez les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH) multipartenaires, campagne qui "sera répétée dans le temps pour accompagner la répétition de ces dépistages".

Elle a profité de son intervention devant cet auditoire truffé de professionnels de santé, en particulier d'infectiologues, pour lancer un "appel à volontaires" pour "aller aider à Mayotte" dans le cadre de la réserve sanitaire, alors que l'archipel est touché par "une crise de l'eau et une épidémie de choléra" (cf dépêche du 22/05/2024 à 15:07 et dépêche du 06/11/2023 à 15:47). Elle a précisé que 50 à 60 personnes étaient "envoyées" toutes les trois semaines pour "vacciner et détecter les cas de choléra". "Médecins, pharmaciens, infirmières, logisticiens", "vieux et jeunes"… tout le monde est invité à s'inscrire à la réserve sanitaire.

Selon les données de l'agence régionale de santé (ARS) Mayotte arrêtées à lundi, 122 cas de choléra dont deux décès ont été recensés sur l'archipel depuis le début de l'alerte, mi-mars.

sb/ab/APMnews

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