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LES AUTO-INJECTEURS D'ADRÉNALINE ACTUELS PEU EFFICACES SUR LE TAUX D'ANAPHYLAXIES FATALES, SELON UNE REVUE DE LA LITTÉRATURE
L'anaphylaxie est un phénomène relativement fréquent et son issue est fatale de façon plus rare, avec une incidence de 0,03 à 0,51 cas par million de personnes par an. Cependant, il est difficile de prédire cette évolution et l'anaphylaxie est considérée comme une urgence médicale pour laquelle l'administration intramusculaire d'adrénaline est recommandée de manière universelle comme traitement de première intention. Pour la faciliter, des dispositifs d'auto-injection ont été développés, rappellent Marcus Sim de l'Imperial College London et ses collègues dans Clinical & Experimental Allergy.
Il faut attendre les années 1960 pour que les auto-injecteurs commencent à être développés et le plus fréquemment utilisé dans le monde, le dispositif EpiPen* à 0,3 mg et 0,15 mg, a été homologué en 1987 aux Etats-Unis et à partir de 1989 en Europe.
Actuellement, trois dispositifs sont disponibles aux Etats-Unis, EpiPen* (Mylan), Adrenaclick* (Impax) et Auvi-Q* (Kaleo), et huit en Europe dont les plus fréquemment prescrits sont EpiPen* (Meda Pharma/Viatris), Jext* (ALK-Abello) et Anapen* (Bioprojet).
Cependant, l'efficacité de l'adrénaline reste incertaine, notamment en raison de la difficulté à étudier dans des essais cliniques randomisés l'issue rare et imprévisible d'une anaphylaxie fatale, observent les chercheurs. Dans cet article, ils ont évalué l'efficacité de ces auto-injecteurs d'adrénaline à prévenir l'issue fatale d'une réaction anaphylactique à l'aide d'études in vivo chez l'animal et l'être humain et d'études épidémiologiques.
Selon ces dernières, l'incidence de l'anaphylaxie, des passages aux urgences pour anaphylaxie et des hospitalisations associées augmentent depuis ces dernières décennies, en particulier concernant les allergies alimentaires chez l'enfant. Cependant, le taux d'anaphylaxie fatale dans la population reste stable au cours de la même période, ce qui suggère que la hausse observée pour l'ensemble des cas d'anaphylaxie pourrait s'expliquer par une meilleure connaissance au sein du grand public et un meilleur codage à l'hôpital.
Si les auto-injecteurs étaient efficaces, on aurait pu s'attendre à une hausse de leur prescription, ce qui est d'ailleurs le cas au Royaume-Uni par exemple, et surtout à une baisse du taux d'anaphylaxie fatale dans la population, commentent les chercheurs. Ils supposent alors que patients ne prennent pas les auto-injecteurs avec eux ou ne les utilisent pas… ou que ces dispositifs ne sont pas efficaces.
Les données disponibles issues d'essais randomisés contrôlés dans des modèles animaux montrent que des perfusions intraveineuses d'adrénaline sont efficaces pour prévenir l'évolution fatale d'une anaphylaxie. Des études chez le rat en particulier montrent qu'il semble possible de prévenir toute anaphylaxie fatale avec un traitement adéquat et rapide et, chez le volontaire sain, il apparaît une réponse cardiovasculaire prévisible, dose-dépendante à la perfusion IV d'adrénaline.
Afin d'inverser les caractéristiques physiologiques d'une anaphylaxie, il faut entre 0,05 et 0,5 µg/kg/min d'adrénaline pendant une à deux heures. En injections intramusculaires, il faut environ 10 µg/kg pour avoir un pic plasmatique similaire à celui obtenu avec la perfusion IV, de 100-500 pg/mL.
Cependant, les données pharmacocinétiques et pharmacodynamiques montrent que les auto-injecteurs d'adrénaline sont associés à une absorption variable d'adrénaline, une demi-vie courte et une réponse cardiovasculaire non prévisible. Ainsi, pour traiter une anaphylaxie sévère, des études cliniques suggèrent qu'il faudrait une perfusion continue et prolongée d'adrénaline.
Concernant l'adrénaline intramusculaire, les quelques études cliniques publiées chez des patients avec une anaphylaxie montrent qu'elle a des effets cardiovasculaires limités et que ses effets respiratoires sont mal caractérisés.
Les études menées sur l'usage de l'adrénaline pour prévenir des anaphylaxies fatales sont limitées à des séries rétrospectives de patients décédés ou qui ont failli mourir. Les résultats laissent penser qu'un retard dans l'administration de l'adrénaline semble associé à une issue fatale mais les données restes insuffisantes pour déterminer à quel point une injection dans les temps contribue à l'évolution d'une anaphylaxie.
L'ensemble de ces données suggère que les auto-injecteurs d'adrénaline ne semblent pas être efficaces de manière fiable pour prévenir les anaphylaxies fatales. Pour une prise en charge des réactions allergiques les plus sévères, il semble nécessaire d'administrer de l'adrénaline en perfusion IV continue, avec un soluté de remplissage vasculaire approprié. Mais la manière de le réaliser en toute sécurité en milieu préhospitalier reste à déterminer, commentent les chercheurs.
Ils jugent donc nécessaire de développer d'autres solutions permettant d'administrer de l'adrénaline de manière soutenue et en toute sécurité. Des voies intranasales et sublinguales sont en cours d'étude, mais avec des données préliminaires indiquant une pharmacocinétique et pharmacodynamies similaires à la voie intramusculaire.
(Clinical & Experimental Allergy, publication en ligne du 9 octobre)
ld/nc/APMnews
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LES AUTO-INJECTEURS D'ADRÉNALINE ACTUELS PEU EFFICACES SUR LE TAUX D'ANAPHYLAXIES FATALES, SELON UNE REVUE DE LA LITTÉRATURE
L'anaphylaxie est un phénomène relativement fréquent et son issue est fatale de façon plus rare, avec une incidence de 0,03 à 0,51 cas par million de personnes par an. Cependant, il est difficile de prédire cette évolution et l'anaphylaxie est considérée comme une urgence médicale pour laquelle l'administration intramusculaire d'adrénaline est recommandée de manière universelle comme traitement de première intention. Pour la faciliter, des dispositifs d'auto-injection ont été développés, rappellent Marcus Sim de l'Imperial College London et ses collègues dans Clinical & Experimental Allergy.
Il faut attendre les années 1960 pour que les auto-injecteurs commencent à être développés et le plus fréquemment utilisé dans le monde, le dispositif EpiPen* à 0,3 mg et 0,15 mg, a été homologué en 1987 aux Etats-Unis et à partir de 1989 en Europe.
Actuellement, trois dispositifs sont disponibles aux Etats-Unis, EpiPen* (Mylan), Adrenaclick* (Impax) et Auvi-Q* (Kaleo), et huit en Europe dont les plus fréquemment prescrits sont EpiPen* (Meda Pharma/Viatris), Jext* (ALK-Abello) et Anapen* (Bioprojet).
Cependant, l'efficacité de l'adrénaline reste incertaine, notamment en raison de la difficulté à étudier dans des essais cliniques randomisés l'issue rare et imprévisible d'une anaphylaxie fatale, observent les chercheurs. Dans cet article, ils ont évalué l'efficacité de ces auto-injecteurs d'adrénaline à prévenir l'issue fatale d'une réaction anaphylactique à l'aide d'études in vivo chez l'animal et l'être humain et d'études épidémiologiques.
Selon ces dernières, l'incidence de l'anaphylaxie, des passages aux urgences pour anaphylaxie et des hospitalisations associées augmentent depuis ces dernières décennies, en particulier concernant les allergies alimentaires chez l'enfant. Cependant, le taux d'anaphylaxie fatale dans la population reste stable au cours de la même période, ce qui suggère que la hausse observée pour l'ensemble des cas d'anaphylaxie pourrait s'expliquer par une meilleure connaissance au sein du grand public et un meilleur codage à l'hôpital.
Si les auto-injecteurs étaient efficaces, on aurait pu s'attendre à une hausse de leur prescription, ce qui est d'ailleurs le cas au Royaume-Uni par exemple, et surtout à une baisse du taux d'anaphylaxie fatale dans la population, commentent les chercheurs. Ils supposent alors que patients ne prennent pas les auto-injecteurs avec eux ou ne les utilisent pas… ou que ces dispositifs ne sont pas efficaces.
Les données disponibles issues d'essais randomisés contrôlés dans des modèles animaux montrent que des perfusions intraveineuses d'adrénaline sont efficaces pour prévenir l'évolution fatale d'une anaphylaxie. Des études chez le rat en particulier montrent qu'il semble possible de prévenir toute anaphylaxie fatale avec un traitement adéquat et rapide et, chez le volontaire sain, il apparaît une réponse cardiovasculaire prévisible, dose-dépendante à la perfusion IV d'adrénaline.
Afin d'inverser les caractéristiques physiologiques d'une anaphylaxie, il faut entre 0,05 et 0,5 µg/kg/min d'adrénaline pendant une à deux heures. En injections intramusculaires, il faut environ 10 µg/kg pour avoir un pic plasmatique similaire à celui obtenu avec la perfusion IV, de 100-500 pg/mL.
Cependant, les données pharmacocinétiques et pharmacodynamiques montrent que les auto-injecteurs d'adrénaline sont associés à une absorption variable d'adrénaline, une demi-vie courte et une réponse cardiovasculaire non prévisible. Ainsi, pour traiter une anaphylaxie sévère, des études cliniques suggèrent qu'il faudrait une perfusion continue et prolongée d'adrénaline.
Concernant l'adrénaline intramusculaire, les quelques études cliniques publiées chez des patients avec une anaphylaxie montrent qu'elle a des effets cardiovasculaires limités et que ses effets respiratoires sont mal caractérisés.
Les études menées sur l'usage de l'adrénaline pour prévenir des anaphylaxies fatales sont limitées à des séries rétrospectives de patients décédés ou qui ont failli mourir. Les résultats laissent penser qu'un retard dans l'administration de l'adrénaline semble associé à une issue fatale mais les données restes insuffisantes pour déterminer à quel point une injection dans les temps contribue à l'évolution d'une anaphylaxie.
L'ensemble de ces données suggère que les auto-injecteurs d'adrénaline ne semblent pas être efficaces de manière fiable pour prévenir les anaphylaxies fatales. Pour une prise en charge des réactions allergiques les plus sévères, il semble nécessaire d'administrer de l'adrénaline en perfusion IV continue, avec un soluté de remplissage vasculaire approprié. Mais la manière de le réaliser en toute sécurité en milieu préhospitalier reste à déterminer, commentent les chercheurs.
Ils jugent donc nécessaire de développer d'autres solutions permettant d'administrer de l'adrénaline de manière soutenue et en toute sécurité. Des voies intranasales et sublinguales sont en cours d'étude, mais avec des données préliminaires indiquant une pharmacocinétique et pharmacodynamies similaires à la voie intramusculaire.
(Clinical & Experimental Allergy, publication en ligne du 9 octobre)
ld/nc/APMnews