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02/12 2024
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LA PRISE EN CHARGE INTENSIVE À DOMICILE "EFFICACE" ET "ADAPTÉE" POUR GÉRER LA CRISE PSYCHIATRIQUE (RECHERCHE EXPÉRIMENTALE)

(Par Julie RICHARD, au Congrès français de psychiatrie)

RENNES, 2 décembre 2024 (APMnews) - Les principaux résultats d'un travail de recherche mené sur l'équipe mobile "Epsiad", de l'établissement public de santé mentale (EPSM) Metz Jury, permettent de confirmer l'efficacité et l'adaptation d'une prise en charge intensive à domicile pour gérer la crise psychiatrique, a expliqué mercredi Laura Saez, psychologue clinicienne, docteure en santé publique et responsable de l'unité de recherche clinique au CHS de Jury, lors d'une conférence au Congrès français de psychiatrie qui se tient de mercredi à vendredi à Rennes.

Lancée en 2021 par les équipes du pôle 4 de l'EPSM de Metz Jury, l'équipe psychiatrique de soins intensifs à domicile (Epsiad) propose aux personnes en situation de crise et d'urgence psychique une prise en charge à domicile pendant quatre semaines, pensée comme une alternative à l'hospitalisation, rappelle-t-on (cf dépêche du 29/11/2024 à 17:12).

"Le lancement de cette équipe mobile était un pari qui a été motivé par un changement d'esprit et non par des contraintes financières, comme ça peut être le cas dans certains contextes", a précisé en préambule Laura Saez.

La création de ce nouveau service s'est fait à effectif constant. "C'est-à-dire qu'il n'y a pas eu de recrutement et de financements supplémentaires, ce qui était idéal pour lancer une recherche quasi expérimentale avant/après", a-t-elle détaillé.

La recherche, portée par les soignants de l'équipe, a été menée sur trois ans. Elle s'est basée sur une analyse des recueils d'informations médicalisés pour la psychiatrie (RIM-P) mais aussi sur des données quantitatives et qualitatives récoltées grâce à plusieurs questionnaires de satisfaction diffusés auprès des patients, leurs proches et l'équipe soignante.

Un premier "questionnaire satisfaction de 26 items" a été diffusé à "près de 200 patients", a précisé Laura Saez. Il a été complété par un second questionnaire rempli par "cinq binômes patients/proches" volontaires pour mener l'enquête qualitative.

Plus de femmes prises en charge

En amont du lancement de l'équipe mobile, une "recherche-action" avait été mise en place pour demander aux soignants ce qu'ils en attendaient, a rappelé Laura Saez.

Les réponses apportées se sont concentrées autour quatre grands items: "diminuer les soins sans consentement", "limiter les durées de séjour en unité psychiatrique", "améliorer la satisfaction des patients et des proches" et "améliorer la pertinence des soins perçus par les soignants", a-t-elle ajouté.

Plusieurs de ces objectifs ont été partiellement atteints, selon les premiers résultats du travail de recherche obtenus grâce aux données RIM-P.

Il révèle tout d'abord que la création de l'Epsiad a permis une augmentation du nombre de prises en charge par le pôle à "environ une centaine" et qu'elle était adaptée "à la grande majorité des situations rencontrées", a expliqué Laura Saez.

Sur trois ans d'exercice, seuls "3% des patients" ont dû finalement être transférés vers l'établissement car la prise en charge à domicile n'apparaissait plus suffisante, a expliqué Laura Saez. Un "bon chiffre", selon elle, "même lorsqu'on le compare à la littérature internationale".

Cette équipe mobile aurait par ailleurs engendré une réduction des durées d'hospitalisation.

"On a une diminution médiane de cinq jours d'hospitalisation", a expliqué Laura Saez qui est toutefois restée prudente sur ce chiffre.

"Cette diminution n'est pas totalement attribuable à l'Epsiad", parce que "7% des prises en charge avaient donné lieu à un transfert d'hospitalisation classique vers le domicile", dans le cadre d'une "sortie précoce", a-t-elle expliqué.

Concernant le profil des patients, l'Epsiad aurait pris en charge plus de femmes, opérant ainsi un "rattrapage de l'équité hommes-femmes" dans les prises en charge à l'échelle du pôle, a-t-elle noté. Un constat qu'elle explique par le fait que les hommes seraient "sur-représentés parmi la population prise en charge à l'hôpital". Cette tendance tend toutefois à évoluer depuis 2023, note-t-on (cf dépêche du 15/10/2024 à 12:49).

La création de l'équipe mobile n'a en revanche pas eu d'impact sur l'âge des patients, avec une médiane "qui se stabilise autour de 43 ans", a-t-elle observé.

Sur la question du moindre recours aux soins sans consentement, "l'objectif a été partiellement réussi", a noté Laura Saez.

"Quand on prend le pôle dans sa globalité, on observe une augmentation importante du taux de soins libres qui passe d'un peu plus d'un tiers à plus de la moitié des prises en charge."

"Disponibilité accrue des infirmiers"

L'enquête quantitative de satisfaction auprès des patients a par ailleurs permis d'identifier une amélioration "de la clarté des informations" concernant les symptômes, les résultats d'examens, les effets du traitement ou encore le suivi médical.

Les questionnaires soulignent aussi l'amélioration de "l'implication du patient dans les décisions médicales", la "prise en compte du ressenti des aidants" et le "respect de l'intimité".

L'équipe mobile aurait par ailleurs permis une "amélioration significative de l'ambiance dans le service ou encore de son organisation", a listé Laura Saez.

L'étude ne révèle cependant pas de différence significative dans "l'identification du médecin référent, la facilité à avoir une infirmière ou encore l'aide apportée pour soulager la douleur".

"On constate toutefois que les patients ont relevé la disponibilité accrue des infirmières, alors même que celles-ci ne sont pas présentes sur place de façon continue", a ajouté Laura Saez.

L'ensemble des constats apportés par les données quantitatives ont été confirmés dans un second temps par la recherche qualitative.

Côté patients, quatre items sont majoritairement ressortis parmi les réponses, à savoir "la durée hospitalisation écourtée", le "sentiment de sécurité", la "fréquence des visites jugée bonnes" ou encore une "meilleure personnalisation des soins".

Du côté des proches, beaucoup ont confié être mieux "impliqués et pris en compte" par l'équipe soignante dans la prise en charge.

Beaucoup ont en outre souligné un "grand soulagement d'avoir une alternative à l'hospitalisation de leur proche, notamment lorsqu'ils avaient une mauvaise d'expérience d'hospitalisation précédente", a expliqué Laura Saez.

L'enquête révèle toutefois un principal critère d'insatisfaction commun aux patients et aux proches concernant les "traitements".

jr/ab/APMnews

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(Par Julie RICHARD, au Congrès français de psychiatrie)

RENNES, 2 décembre 2024 (APMnews) - Les principaux résultats d'un travail de recherche mené sur l'équipe mobile "Epsiad", de l'établissement public de santé mentale (EPSM) Metz Jury, permettent de confirmer l'efficacité et l'adaptation d'une prise en charge intensive à domicile pour gérer la crise psychiatrique, a expliqué mercredi Laura Saez, psychologue clinicienne, docteure en santé publique et responsable de l'unité de recherche clinique au CHS de Jury, lors d'une conférence au Congrès français de psychiatrie qui se tient de mercredi à vendredi à Rennes.

Lancée en 2021 par les équipes du pôle 4 de l'EPSM de Metz Jury, l'équipe psychiatrique de soins intensifs à domicile (Epsiad) propose aux personnes en situation de crise et d'urgence psychique une prise en charge à domicile pendant quatre semaines, pensée comme une alternative à l'hospitalisation, rappelle-t-on (cf dépêche du 29/11/2024 à 17:12).

"Le lancement de cette équipe mobile était un pari qui a été motivé par un changement d'esprit et non par des contraintes financières, comme ça peut être le cas dans certains contextes", a précisé en préambule Laura Saez.

La création de ce nouveau service s'est fait à effectif constant. "C'est-à-dire qu'il n'y a pas eu de recrutement et de financements supplémentaires, ce qui était idéal pour lancer une recherche quasi expérimentale avant/après", a-t-elle détaillé.

La recherche, portée par les soignants de l'équipe, a été menée sur trois ans. Elle s'est basée sur une analyse des recueils d'informations médicalisés pour la psychiatrie (RIM-P) mais aussi sur des données quantitatives et qualitatives récoltées grâce à plusieurs questionnaires de satisfaction diffusés auprès des patients, leurs proches et l'équipe soignante.

Un premier "questionnaire satisfaction de 26 items" a été diffusé à "près de 200 patients", a précisé Laura Saez. Il a été complété par un second questionnaire rempli par "cinq binômes patients/proches" volontaires pour mener l'enquête qualitative.

Plus de femmes prises en charge

En amont du lancement de l'équipe mobile, une "recherche-action" avait été mise en place pour demander aux soignants ce qu'ils en attendaient, a rappelé Laura Saez.

Les réponses apportées se sont concentrées autour quatre grands items: "diminuer les soins sans consentement", "limiter les durées de séjour en unité psychiatrique", "améliorer la satisfaction des patients et des proches" et "améliorer la pertinence des soins perçus par les soignants", a-t-elle ajouté.

Plusieurs de ces objectifs ont été partiellement atteints, selon les premiers résultats du travail de recherche obtenus grâce aux données RIM-P.

Il révèle tout d'abord que la création de l'Epsiad a permis une augmentation du nombre de prises en charge par le pôle à "environ une centaine" et qu'elle était adaptée "à la grande majorité des situations rencontrées", a expliqué Laura Saez.

Sur trois ans d'exercice, seuls "3% des patients" ont dû finalement être transférés vers l'établissement car la prise en charge à domicile n'apparaissait plus suffisante, a expliqué Laura Saez. Un "bon chiffre", selon elle, "même lorsqu'on le compare à la littérature internationale".

Cette équipe mobile aurait par ailleurs engendré une réduction des durées d'hospitalisation.

"On a une diminution médiane de cinq jours d'hospitalisation", a expliqué Laura Saez qui est toutefois restée prudente sur ce chiffre.

"Cette diminution n'est pas totalement attribuable à l'Epsiad", parce que "7% des prises en charge avaient donné lieu à un transfert d'hospitalisation classique vers le domicile", dans le cadre d'une "sortie précoce", a-t-elle expliqué.

Concernant le profil des patients, l'Epsiad aurait pris en charge plus de femmes, opérant ainsi un "rattrapage de l'équité hommes-femmes" dans les prises en charge à l'échelle du pôle, a-t-elle noté. Un constat qu'elle explique par le fait que les hommes seraient "sur-représentés parmi la population prise en charge à l'hôpital". Cette tendance tend toutefois à évoluer depuis 2023, note-t-on (cf dépêche du 15/10/2024 à 12:49).

La création de l'équipe mobile n'a en revanche pas eu d'impact sur l'âge des patients, avec une médiane "qui se stabilise autour de 43 ans", a-t-elle observé.

Sur la question du moindre recours aux soins sans consentement, "l'objectif a été partiellement réussi", a noté Laura Saez.

"Quand on prend le pôle dans sa globalité, on observe une augmentation importante du taux de soins libres qui passe d'un peu plus d'un tiers à plus de la moitié des prises en charge."

"Disponibilité accrue des infirmiers"

L'enquête quantitative de satisfaction auprès des patients a par ailleurs permis d'identifier une amélioration "de la clarté des informations" concernant les symptômes, les résultats d'examens, les effets du traitement ou encore le suivi médical.

Les questionnaires soulignent aussi l'amélioration de "l'implication du patient dans les décisions médicales", la "prise en compte du ressenti des aidants" et le "respect de l'intimité".

L'équipe mobile aurait par ailleurs permis une "amélioration significative de l'ambiance dans le service ou encore de son organisation", a listé Laura Saez.

L'étude ne révèle cependant pas de différence significative dans "l'identification du médecin référent, la facilité à avoir une infirmière ou encore l'aide apportée pour soulager la douleur".

"On constate toutefois que les patients ont relevé la disponibilité accrue des infirmières, alors même que celles-ci ne sont pas présentes sur place de façon continue", a ajouté Laura Saez.

L'ensemble des constats apportés par les données quantitatives ont été confirmés dans un second temps par la recherche qualitative.

Côté patients, quatre items sont majoritairement ressortis parmi les réponses, à savoir "la durée hospitalisation écourtée", le "sentiment de sécurité", la "fréquence des visites jugée bonnes" ou encore une "meilleure personnalisation des soins".

Du côté des proches, beaucoup ont confié être mieux "impliqués et pris en compte" par l'équipe soignante dans la prise en charge.

Beaucoup ont en outre souligné un "grand soulagement d'avoir une alternative à l'hospitalisation de leur proche, notamment lorsqu'ils avaient une mauvaise d'expérience d'hospitalisation précédente", a expliqué Laura Saez.

L'enquête révèle toutefois un principal critère d'insatisfaction commun aux patients et aux proches concernant les "traitements".

jr/ab/APMnews

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