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14/11 2024
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HAUTE-MARNE: DES PATIENTS DANS LE GARAGE "TOUTES LES SEMAINES" AUX URGENCES DU CH DE LANGRES (ANCIEN CHEF DU SERVICE)

LANGRES (Haute-Marne), 14 novembre 2024 (APMnews) - A la suite de la plainte récente d'un patient, l'ancien chef du service des urgences du centre hospitalier (CH) de Langres, le Dr Vincent Escudier, a dépeint mercredi soir à APMnews la dégradation chronique de l'accueil et de la prise en charge des patients dans son service du fait de la réduction des capacités d'aval de l'hôpital haut-marnais depuis deux ans.

Depuis lundi, plusieurs médias nationaux ont relayé des récriminations d'un patient de 45 ans orienté le 26 octobre par le Samu pour une inflammation intestinale vers les urgences du CH de Langres où il a été hospitalisé, avant d'être transféré au sein du garage Smur de l'établissement où étaient hospitalisés d'autres patients, a-t-il notamment relaté à BFMTV.

Choqué par ces conditions d'hospitalisation, et se plaignant notamment du bruit de la ventilation, ce patient a demandé à quitter précocement l'hôpital puis s'est plaint de sa prise en charge dans un courrier adressé à la fois à l'agence régionale de santé (ARS) Grand Est, au CH de Langres et au ministère de la santé et de l'accès aux soins, a-t-il expliqué à France Télévisions.

"Les patients dans le garage, c'est devenu quelque chose qui se produit toutes les semaines" au CH de Langres, a rapporté l'ancien chef du service d'urgence de l'établissement, le Dr Escudier, qui avait démissionné un mois auparavant.

"J'ai présenté ma démission de la chefferie de service mais continue de travailler dans le service depuis plus d'un mois", s'est-il expliqué. "Je ne peux ni cautionner la gestion imposée sans concertation ni information et encore moins supporter la moindre responsabilité des risques professionnels imposés ainsi que la maltraitance imposée et mortelle pour les patients âgés et fragiles."

"Avant, on ne connaissait pas le problème des patients brancards, avec un capacitaire qui était encore cohérent", a recontextualisé l'urgentiste. Il fait remonter les premières tensions aux urgences à l'été 2021, avec la mise en application de la loi Rist sur le plafonnement de l'intérim (cf dépêche du 21/03/2023 à 15:58), qui a compliqué le bon fonctionnement de l'établissement avec l'apparition de difficultés pour remplacer les médecins titulaires pendant leurs congés.

"On avait réussi à préserver une belle offre de soins, avec de la cardio, de la neuro, de la néphro, de la gastro, de la diabéto-endocrinologie, la médecine polyvalente, et de la chirurgie viscérale et orthopédique", a-t-il déploré, en reconnaissant que la plupart de ces activités reposaient sur la présence d'un unique spécialiste au CH de Langres.

Une dégradation à la suite de la suppression de lits d'aval

Les tensions se sont également accrues lorsque la direction de l'établissement a décidé la fermeture, présentée alors comme "provisoire", du service de soins médicaux de réadaptation (SMR -ex SSR) en 2021, a relaté le Dr Escudier, en glissant que la direction avait alors proposé un compromis aux équipes médico-soignantes du CH de Langres. Il s'agissait de "redispatch[er] les personnels dans les autres services", dont "une aide-soignante la nuit aux urgences, réclamée depuis des années".

Cependant, la fermeture des 22 lits de SMR n'a jamais pu être compensée, alors que 12 lits de médecine ont été convertis en lits de SMR pour absorber les patients du service d'urgence, malgré une activité modeste avec 15.000 passages en moyenne par an: "Ça a eu un impact immédiat sur les urgences, avec une situation dramatique à l'hiver suivant [2021-2022], avec 20 patients aux urgences sur les quatre lits autorisés en unité d'hospitalisation de courte durée."

"Très vite, la seule solution ça a été de positionner les patients dans le garage Smur qui avait été conçu avec six postes équipés d'oxygénation pour prendre en charge des patients dans des conditions exceptionnelles", a poursuivi l'ancien chef de service. "Les gens étaient traumatisés, les soignants aussi, avec de la médecine qui s'assimilait à la médecine de guerre, l'impression d'être maltraitants et de faire encourir des risques aux patients."

"On a écrit des mails d'alerte à l'ARS Grand Est dès octobre-novembre 2022, qui sont restés sans réponse", a-t-il assuré, alors que ces conditions dégradées de prise en charge se sont régulièrement reproduites par la suite, au point de devenir quasi hebdomadaires, même en dehors de pics épidémiques hivernaux et des tensions estivales.

Un autre facteur aggravant, selon le Dr Escudier, a été la vente du bâtiment où étaient historiquement installés les services administratifs du CH de Langres et leur transfert dans les étages laissés libres par la fermeture du service de SMR: "Maintenant on est dans un bâtiment où deux étages sur quatre sont occupés par l'administration."

L'ARS assure prendre "les actions nécessaires pour mettre un terme définitif à de telles pratiques"

Contactée mardi par APMnews, l'ARS Grand Est a indiqué avoir "pris connaissance" de la plainte du patient hospitalisé fin octobre, en évoquant "des situations similaires dans cet établissement […] signalées en 2023" à l'agence, ce qui l'avait conduite "à diligenter une inspection en urgence".

"A l'issue de cette inspection, l'ARS avait émis le 30 juin 2023 une injonction de cesser immédiatement l'utilisation inacceptable du local 'garage Smur' pour l'installation de patients relevant potentiellement de l'unité d'hospitalisation de courte durée [UHCD]", a poursuivi l'agence. L'ARS a ajouté que cette injonction avait été accompagnée "d'un certain nombre d'autres prescriptions afin de retrouver des pratiques garantissant une bonne qualité et sécurité des soins pour les patients".

"L'établissement avait indiqué, preuves à l'appui, avoir rendu le local à ses fonctions initiales et apporté un certain nombre de garanties pour que la situation ne se reproduise pas, avec des mesures à court terme et à plus long terme", a assuré l'ARS en évoquant des travaux.

A la suite de cette nouvelle polémique, l'ARS fait savoir qu'elle menait "des investigations complémentaires pour comprendre dans quelles conditions un patient a pu de nouveau se trouver hospitalisé dans ce local et mobiliser avec l'établissement toutes les actions nécessaires pour mettre un terme définitif à de telles pratiques".

Après les injonctions formulées par l'agence, la direction aurait proposé "de transformer le garage en zone d'hospitalisation", en proposant un investissement inférieur à 30.000 euros afin de simplifier les procédures, a rapporté l'urgentiste.

"S'il y a besoin de rien il faut les appeler"

"Ça devait être fait avant septembre 2023 mais un an après, on en était au même stade, s'il y a besoin de rien il faut les appeler", s'est-il agacé, en fustigeant l'absence totale d'implication des personnels dans les décisions prises par la direction pour l'adaptation des locaux des urgences: "Parfois on voyait des gens arriver avec des mètres, prendre des mesures, sans avoir été concertés."

"Finalement on a trouvé un compromis pour faire une zone de quatre lits d'UHCD dans le garage et conserver une zone pour le Smur", a-t-il indiqué. "Tout ça, c'est un pansement sur une jambe de bois, il faudrait réfléchir à voir comment on peut rouvrir du capacitaire."

Pour l'ancien chef de service, les perspectives pour les hôpitaux du Sud Haute-Marne (qui regroupent les CH de Chaumont, Langres et Bourbonne-les-Bains sous une direction commune) ne font que s'assombrir alors qu'il s'était déjà opposé par le passé à leur projet de restructuration immobilière. Ce dernier prévoit de concentrer le plateau technique de médecine, chirurgie, obstétrique (MCO) à Chaumont, tandis que le CH de Langres deviendrait un hôpital de proximité (cf dépêche du 19/12/2022 à 18:25 et dépêche du 19/05/2023 à 18:31).

Le CH de Bourbonne-les-Bains, troisième établissement en direction commune des hôpitaux du Sud Haute-Marne, resterait quant à lui un hôpital de proximité spécialisé en médecine physique et réadaptation (MPR).

"Beaucoup de médecins ont quitté le navire depuis six ans, avec la perspective de l'arrêt des spécialistes et la fermeture de deux des trois services de médecine", a-t-il regretté, brocardant au passage le manque de soutien de l'administration et de la direction: "Quand on demande de l'aide, on n'est jamais entendu!"

"Les tensions ont aussi gagné le personnel paramédical, avec des départs d'infirmières et soignantes", a-t-il souligné avant de conclure: "On a normalisé l'inadmissible, le drame c'est qu'il manque des lits."

En décembre 2023, la Haute autorité de santé (HAS) avait prononcé la non-certification des Hôpitaux du Sud Haute-Marne, en faisant état de "contextes portant atteinte" au droit des patients à l'intimité et à la dignité, en mentionnant des personnes "en attente couchées dans le couloir des urgences sans aucun dispositif pour garantir l'intimité et la dignité, des portes de salles d'examen aux urgences ouvertes" (cf dépêche du 14/12/2023 à 17:25).

La direction des hôpitaux du Sud Haute-Marne n'a pas donné suite aux sollicitations répétées d'APMnews.

gl/ab-san/APMnews

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LANGRES (Haute-Marne), 14 novembre 2024 (APMnews) - A la suite de la plainte récente d'un patient, l'ancien chef du service des urgences du centre hospitalier (CH) de Langres, le Dr Vincent Escudier, a dépeint mercredi soir à APMnews la dégradation chronique de l'accueil et de la prise en charge des patients dans son service du fait de la réduction des capacités d'aval de l'hôpital haut-marnais depuis deux ans.

Depuis lundi, plusieurs médias nationaux ont relayé des récriminations d'un patient de 45 ans orienté le 26 octobre par le Samu pour une inflammation intestinale vers les urgences du CH de Langres où il a été hospitalisé, avant d'être transféré au sein du garage Smur de l'établissement où étaient hospitalisés d'autres patients, a-t-il notamment relaté à BFMTV.

Choqué par ces conditions d'hospitalisation, et se plaignant notamment du bruit de la ventilation, ce patient a demandé à quitter précocement l'hôpital puis s'est plaint de sa prise en charge dans un courrier adressé à la fois à l'agence régionale de santé (ARS) Grand Est, au CH de Langres et au ministère de la santé et de l'accès aux soins, a-t-il expliqué à France Télévisions.

"Les patients dans le garage, c'est devenu quelque chose qui se produit toutes les semaines" au CH de Langres, a rapporté l'ancien chef du service d'urgence de l'établissement, le Dr Escudier, qui avait démissionné un mois auparavant.

"J'ai présenté ma démission de la chefferie de service mais continue de travailler dans le service depuis plus d'un mois", s'est-il expliqué. "Je ne peux ni cautionner la gestion imposée sans concertation ni information et encore moins supporter la moindre responsabilité des risques professionnels imposés ainsi que la maltraitance imposée et mortelle pour les patients âgés et fragiles."

"Avant, on ne connaissait pas le problème des patients brancards, avec un capacitaire qui était encore cohérent", a recontextualisé l'urgentiste. Il fait remonter les premières tensions aux urgences à l'été 2021, avec la mise en application de la loi Rist sur le plafonnement de l'intérim (cf dépêche du 21/03/2023 à 15:58), qui a compliqué le bon fonctionnement de l'établissement avec l'apparition de difficultés pour remplacer les médecins titulaires pendant leurs congés.

"On avait réussi à préserver une belle offre de soins, avec de la cardio, de la neuro, de la néphro, de la gastro, de la diabéto-endocrinologie, la médecine polyvalente, et de la chirurgie viscérale et orthopédique", a-t-il déploré, en reconnaissant que la plupart de ces activités reposaient sur la présence d'un unique spécialiste au CH de Langres.

Une dégradation à la suite de la suppression de lits d'aval

Les tensions se sont également accrues lorsque la direction de l'établissement a décidé la fermeture, présentée alors comme "provisoire", du service de soins médicaux de réadaptation (SMR -ex SSR) en 2021, a relaté le Dr Escudier, en glissant que la direction avait alors proposé un compromis aux équipes médico-soignantes du CH de Langres. Il s'agissait de "redispatch[er] les personnels dans les autres services", dont "une aide-soignante la nuit aux urgences, réclamée depuis des années".

Cependant, la fermeture des 22 lits de SMR n'a jamais pu être compensée, alors que 12 lits de médecine ont été convertis en lits de SMR pour absorber les patients du service d'urgence, malgré une activité modeste avec 15.000 passages en moyenne par an: "Ça a eu un impact immédiat sur les urgences, avec une situation dramatique à l'hiver suivant [2021-2022], avec 20 patients aux urgences sur les quatre lits autorisés en unité d'hospitalisation de courte durée."

"Très vite, la seule solution ça a été de positionner les patients dans le garage Smur qui avait été conçu avec six postes équipés d'oxygénation pour prendre en charge des patients dans des conditions exceptionnelles", a poursuivi l'ancien chef de service. "Les gens étaient traumatisés, les soignants aussi, avec de la médecine qui s'assimilait à la médecine de guerre, l'impression d'être maltraitants et de faire encourir des risques aux patients."

"On a écrit des mails d'alerte à l'ARS Grand Est dès octobre-novembre 2022, qui sont restés sans réponse", a-t-il assuré, alors que ces conditions dégradées de prise en charge se sont régulièrement reproduites par la suite, au point de devenir quasi hebdomadaires, même en dehors de pics épidémiques hivernaux et des tensions estivales.

Un autre facteur aggravant, selon le Dr Escudier, a été la vente du bâtiment où étaient historiquement installés les services administratifs du CH de Langres et leur transfert dans les étages laissés libres par la fermeture du service de SMR: "Maintenant on est dans un bâtiment où deux étages sur quatre sont occupés par l'administration."

L'ARS assure prendre "les actions nécessaires pour mettre un terme définitif à de telles pratiques"

Contactée mardi par APMnews, l'ARS Grand Est a indiqué avoir "pris connaissance" de la plainte du patient hospitalisé fin octobre, en évoquant "des situations similaires dans cet établissement […] signalées en 2023" à l'agence, ce qui l'avait conduite "à diligenter une inspection en urgence".

"A l'issue de cette inspection, l'ARS avait émis le 30 juin 2023 une injonction de cesser immédiatement l'utilisation inacceptable du local 'garage Smur' pour l'installation de patients relevant potentiellement de l'unité d'hospitalisation de courte durée [UHCD]", a poursuivi l'agence. L'ARS a ajouté que cette injonction avait été accompagnée "d'un certain nombre d'autres prescriptions afin de retrouver des pratiques garantissant une bonne qualité et sécurité des soins pour les patients".

"L'établissement avait indiqué, preuves à l'appui, avoir rendu le local à ses fonctions initiales et apporté un certain nombre de garanties pour que la situation ne se reproduise pas, avec des mesures à court terme et à plus long terme", a assuré l'ARS en évoquant des travaux.

A la suite de cette nouvelle polémique, l'ARS fait savoir qu'elle menait "des investigations complémentaires pour comprendre dans quelles conditions un patient a pu de nouveau se trouver hospitalisé dans ce local et mobiliser avec l'établissement toutes les actions nécessaires pour mettre un terme définitif à de telles pratiques".

Après les injonctions formulées par l'agence, la direction aurait proposé "de transformer le garage en zone d'hospitalisation", en proposant un investissement inférieur à 30.000 euros afin de simplifier les procédures, a rapporté l'urgentiste.

"S'il y a besoin de rien il faut les appeler"

"Ça devait être fait avant septembre 2023 mais un an après, on en était au même stade, s'il y a besoin de rien il faut les appeler", s'est-il agacé, en fustigeant l'absence totale d'implication des personnels dans les décisions prises par la direction pour l'adaptation des locaux des urgences: "Parfois on voyait des gens arriver avec des mètres, prendre des mesures, sans avoir été concertés."

"Finalement on a trouvé un compromis pour faire une zone de quatre lits d'UHCD dans le garage et conserver une zone pour le Smur", a-t-il indiqué. "Tout ça, c'est un pansement sur une jambe de bois, il faudrait réfléchir à voir comment on peut rouvrir du capacitaire."

Pour l'ancien chef de service, les perspectives pour les hôpitaux du Sud Haute-Marne (qui regroupent les CH de Chaumont, Langres et Bourbonne-les-Bains sous une direction commune) ne font que s'assombrir alors qu'il s'était déjà opposé par le passé à leur projet de restructuration immobilière. Ce dernier prévoit de concentrer le plateau technique de médecine, chirurgie, obstétrique (MCO) à Chaumont, tandis que le CH de Langres deviendrait un hôpital de proximité (cf dépêche du 19/12/2022 à 18:25 et dépêche du 19/05/2023 à 18:31).

Le CH de Bourbonne-les-Bains, troisième établissement en direction commune des hôpitaux du Sud Haute-Marne, resterait quant à lui un hôpital de proximité spécialisé en médecine physique et réadaptation (MPR).

"Beaucoup de médecins ont quitté le navire depuis six ans, avec la perspective de l'arrêt des spécialistes et la fermeture de deux des trois services de médecine", a-t-il regretté, brocardant au passage le manque de soutien de l'administration et de la direction: "Quand on demande de l'aide, on n'est jamais entendu!"

"Les tensions ont aussi gagné le personnel paramédical, avec des départs d'infirmières et soignantes", a-t-il souligné avant de conclure: "On a normalisé l'inadmissible, le drame c'est qu'il manque des lits."

En décembre 2023, la Haute autorité de santé (HAS) avait prononcé la non-certification des Hôpitaux du Sud Haute-Marne, en faisant état de "contextes portant atteinte" au droit des patients à l'intimité et à la dignité, en mentionnant des personnes "en attente couchées dans le couloir des urgences sans aucun dispositif pour garantir l'intimité et la dignité, des portes de salles d'examen aux urgences ouvertes" (cf dépêche du 14/12/2023 à 17:25).

La direction des hôpitaux du Sud Haute-Marne n'a pas donné suite aux sollicitations répétées d'APMnews.

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