Actualités de l'Urgence - APM

DES FREINS PLUS LÉGISTIQUES QUE TECHNIQUES POUR L'ACCÈS AUX DONNÉES SUR L'ACTIVITÉ DES URGENCES (FEDORU)
L'activité des services d'urgence est tracée par les résumés de passage aux urgences (RPU), un recueil standardisé de données médicalisées regroupant aujourd'hui 18 indicateurs qui permettent de décrire chaque passage dans un service d'urgence.
Cet indicateur créé en 2006, sur proposition de la Société française de médecine d'urgence (SFMU), pour faire de la veille sanitaire et pouvoir prévenir un événement sanitaire exceptionnel au travers d'un flux de données à la suite de la canicule de l'été 2003, est obligatoire depuis 2013.
"Aujourd'hui, les acteurs qui génèrent ce flux sont les urgentistes et les structures d'urgence, qui remontent les données vers un opérateur régional, les ORU [observatoires régionaux des urgences] et/ou les Grades [groupements régionaux d'appui au développement de l'e-santé]", a exposé Marc Noizet, président de Samu-Urgences de France (SUdF) et vice-président de la Fedoru.
Ces données sont ensuite remontées vers l'Agence technique de l'information sur l'hospitalisation (ATIH) et Santé publique France (SPF). "Et donc deux bases de données différentes", a souligné le Dr Noizet, en faisant remarquer par ailleurs que certains champs des RPU étaient "plus fragiles" que d'autres, comme le "motif de recours".
"La Fedoru n'est pas en mesure d'avoir une base de données exploitable", a regretté son vice-président, en expliquant que la fédération avait donc recours à des agglomérations de données de chacun des ORU pour faire des enquêtes nationales, "ce qui rend les choses extrêmement compliquées lorsqu'on veut faire de l'analyse".
"Les enjeux métiers pour nous aujourd'hui, c'est l'accès plus facile à cette base de données, qui puisse être nationale, en respectant le champ du RGPD [règlement général de protection des données] et de la Cnil [Commission nationale de l'informatique et des libertés]", a-t-il ajouté.
Un moyen de pilotage "à chaud" et "à froid"
Interrogé sur les usages de ces données, le directeur adjoint du premier recours de l'agence régionale de santé (ARS) Occitanie, Benoît Ricaut-Larose, a expliqué que son agence avait deux usages principaux des données remontées par son ORU:
- le "pilotage à chaud", illustré par la création d'un indicateur "hôpital en tension" (HET) par l'ORU Occitanie, "qui permet d'avoir quotidiennement un rapport visuel sur le niveau de tension d'un établissement" (capacités d'aval, activité du service d'accueil des urgences -SAU-, nombre de passages gériatriques…)
- le "pilotage à froid", avec des retours d'expérience "pour voir ce qu'on n'a pas vu, pas bien détecté ou interprété".
"En ce moment, on prépare un retex [retour d'expérience] sur la dernière épidémie hivernale de grippe", a évoqué Benoît Ricaut-Larose à titre d'exemple. "On a peut-être déclenché trop tard les plans de mobilisation internes alors qu'on avait les données."
"Le retex à froid permet aussi d'analyser les parcours, les organisations, le recours aux urgences d'une structure, d'un territoire", a-t-il poursuivi, en ajoutant que ces données comportaient également un enjeu financier puisque la dotation populationnelle attribuée aux services d'urgence "est aussi déterminée sur la base des RPU".
"Comment est-ce qu'on peut piloter localement une offre de soins si on n'a pas le regard de la France entière?" a réagi Marc Noizet. "C'est juste impossible!"
"L'enjeu c'est d'avoir un accès simple à ces flux de données", a-t-il poursuivi, en appelant à agglomérer l'accès à d'autres flux de données comme celles issues de la régulation et à la mise en œuvre d'un RPU de nouvelle génération, dit "V3": "Il manque juste le texte d'application."
"Il y a quand même des sujets techniques pour la remontée des données", a fait remarquer le responsable du pôle santé publique et situations sanitaires exceptionnelles de la délégation au numérique en santé (DNS), Xavier Vitry.
"Remonter de la donnée tous les mois, ce n'est pas pareil que la remonter toutes les semaines, il y a quand même des impacts budgétaires", a-t-il enchaîné, en faisant également état de l'absence d'un "cadre juridique au niveau national pour faciliter l'accès, en fonction des finalités et du type d'usage": "Je pense que tout le monde convient des finalités et de l'utilité [de l'accès à ces données], mieux opérer notre système, mieux comprendre, mais il nous faut ce cadre réglementaire de façon à permettre à nos acteurs d'opérer des recherches et de l'analyse en temps réel de données."
"Des enjeux techniques en termes de droit"
"Il n'y a pas de problèmes techniques en matière de tuyauterie peut-être, mais il y a des enjeux techniques en termes de droit", a estimé de son côté Mickaël Benzaqui, sous-directeur de l'accès aux soins et du premier recours à la direction générale de l'offre de soins (DGOS).
Il a notamment souhaité mettre en exergue les complexités soulevées par l'exploitation de données pour objectiver les activités de soins.
"Quels sont les bons indicateurs pour déterminer la part des passages qui relève bien de la médecine d'urgence?", a-t-il cité, soulignant que la classification clinique des malades aux urgences (CCMU) comme les passages relevant potentiellement de la ville (PRPV) pouvaient prêter le flanc aux critiques: "Il y a toujours un sujet sur la qualité de la donnée."
"Sur le sujet de l'accès aux données, même nous, à la DGOS, on n'a pas accès à la totalité des données", a-t-il poursuivi. "Evidemment, quand on demande l'accès à l'ATIH, on a les données parce qu'ils sont sympas et qu'on est leur tutelle, mais on n'a pas accès aux données de Santé publique France" (SPF).
Il a également pris l'exemple des caisses primaires d'assurance maladie (CPAM) qui n'ont pas accès aux données nationales de l'assurance maladie.
Enfin, sur les demandes répétées concernant les RPU V3, le sous-directeur de la DGOS a tenu à rappeler que l'instabilité gouvernementale n'avait pas contribué à permettre au sujet d'avancer au rythme attendu: "Il ne faut pas oublier qu'en 2024, on a eu quatre premiers ministres, que depuis deux ans on a eu sept ministres chargés de la santé."
"La difficulté c'est qu'à chaque fois qu'il y a un nouveau ministre, il y a un nouveau cabinet, c'est le stop and go systématique", a-t-il complété, tout en invitant les représentants des urgentistes à venir échanger avec lui sur leurs priorités.
gl/nc/APMnews
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DES FREINS PLUS LÉGISTIQUES QUE TECHNIQUES POUR L'ACCÈS AUX DONNÉES SUR L'ACTIVITÉ DES URGENCES (FEDORU)
L'activité des services d'urgence est tracée par les résumés de passage aux urgences (RPU), un recueil standardisé de données médicalisées regroupant aujourd'hui 18 indicateurs qui permettent de décrire chaque passage dans un service d'urgence.
Cet indicateur créé en 2006, sur proposition de la Société française de médecine d'urgence (SFMU), pour faire de la veille sanitaire et pouvoir prévenir un événement sanitaire exceptionnel au travers d'un flux de données à la suite de la canicule de l'été 2003, est obligatoire depuis 2013.
"Aujourd'hui, les acteurs qui génèrent ce flux sont les urgentistes et les structures d'urgence, qui remontent les données vers un opérateur régional, les ORU [observatoires régionaux des urgences] et/ou les Grades [groupements régionaux d'appui au développement de l'e-santé]", a exposé Marc Noizet, président de Samu-Urgences de France (SUdF) et vice-président de la Fedoru.
Ces données sont ensuite remontées vers l'Agence technique de l'information sur l'hospitalisation (ATIH) et Santé publique France (SPF). "Et donc deux bases de données différentes", a souligné le Dr Noizet, en faisant remarquer par ailleurs que certains champs des RPU étaient "plus fragiles" que d'autres, comme le "motif de recours".
"La Fedoru n'est pas en mesure d'avoir une base de données exploitable", a regretté son vice-président, en expliquant que la fédération avait donc recours à des agglomérations de données de chacun des ORU pour faire des enquêtes nationales, "ce qui rend les choses extrêmement compliquées lorsqu'on veut faire de l'analyse".
"Les enjeux métiers pour nous aujourd'hui, c'est l'accès plus facile à cette base de données, qui puisse être nationale, en respectant le champ du RGPD [règlement général de protection des données] et de la Cnil [Commission nationale de l'informatique et des libertés]", a-t-il ajouté.
Un moyen de pilotage "à chaud" et "à froid"
Interrogé sur les usages de ces données, le directeur adjoint du premier recours de l'agence régionale de santé (ARS) Occitanie, Benoît Ricaut-Larose, a expliqué que son agence avait deux usages principaux des données remontées par son ORU:
- le "pilotage à chaud", illustré par la création d'un indicateur "hôpital en tension" (HET) par l'ORU Occitanie, "qui permet d'avoir quotidiennement un rapport visuel sur le niveau de tension d'un établissement" (capacités d'aval, activité du service d'accueil des urgences -SAU-, nombre de passages gériatriques…)
- le "pilotage à froid", avec des retours d'expérience "pour voir ce qu'on n'a pas vu, pas bien détecté ou interprété".
"En ce moment, on prépare un retex [retour d'expérience] sur la dernière épidémie hivernale de grippe", a évoqué Benoît Ricaut-Larose à titre d'exemple. "On a peut-être déclenché trop tard les plans de mobilisation internes alors qu'on avait les données."
"Le retex à froid permet aussi d'analyser les parcours, les organisations, le recours aux urgences d'une structure, d'un territoire", a-t-il poursuivi, en ajoutant que ces données comportaient également un enjeu financier puisque la dotation populationnelle attribuée aux services d'urgence "est aussi déterminée sur la base des RPU".
"Comment est-ce qu'on peut piloter localement une offre de soins si on n'a pas le regard de la France entière?" a réagi Marc Noizet. "C'est juste impossible!"
"L'enjeu c'est d'avoir un accès simple à ces flux de données", a-t-il poursuivi, en appelant à agglomérer l'accès à d'autres flux de données comme celles issues de la régulation et à la mise en œuvre d'un RPU de nouvelle génération, dit "V3": "Il manque juste le texte d'application."
"Il y a quand même des sujets techniques pour la remontée des données", a fait remarquer le responsable du pôle santé publique et situations sanitaires exceptionnelles de la délégation au numérique en santé (DNS), Xavier Vitry.
"Remonter de la donnée tous les mois, ce n'est pas pareil que la remonter toutes les semaines, il y a quand même des impacts budgétaires", a-t-il enchaîné, en faisant également état de l'absence d'un "cadre juridique au niveau national pour faciliter l'accès, en fonction des finalités et du type d'usage": "Je pense que tout le monde convient des finalités et de l'utilité [de l'accès à ces données], mieux opérer notre système, mieux comprendre, mais il nous faut ce cadre réglementaire de façon à permettre à nos acteurs d'opérer des recherches et de l'analyse en temps réel de données."
"Des enjeux techniques en termes de droit"
"Il n'y a pas de problèmes techniques en matière de tuyauterie peut-être, mais il y a des enjeux techniques en termes de droit", a estimé de son côté Mickaël Benzaqui, sous-directeur de l'accès aux soins et du premier recours à la direction générale de l'offre de soins (DGOS).
Il a notamment souhaité mettre en exergue les complexités soulevées par l'exploitation de données pour objectiver les activités de soins.
"Quels sont les bons indicateurs pour déterminer la part des passages qui relève bien de la médecine d'urgence?", a-t-il cité, soulignant que la classification clinique des malades aux urgences (CCMU) comme les passages relevant potentiellement de la ville (PRPV) pouvaient prêter le flanc aux critiques: "Il y a toujours un sujet sur la qualité de la donnée."
"Sur le sujet de l'accès aux données, même nous, à la DGOS, on n'a pas accès à la totalité des données", a-t-il poursuivi. "Evidemment, quand on demande l'accès à l'ATIH, on a les données parce qu'ils sont sympas et qu'on est leur tutelle, mais on n'a pas accès aux données de Santé publique France" (SPF).
Il a également pris l'exemple des caisses primaires d'assurance maladie (CPAM) qui n'ont pas accès aux données nationales de l'assurance maladie.
Enfin, sur les demandes répétées concernant les RPU V3, le sous-directeur de la DGOS a tenu à rappeler que l'instabilité gouvernementale n'avait pas contribué à permettre au sujet d'avancer au rythme attendu: "Il ne faut pas oublier qu'en 2024, on a eu quatre premiers ministres, que depuis deux ans on a eu sept ministres chargés de la santé."
"La difficulté c'est qu'à chaque fois qu'il y a un nouveau ministre, il y a un nouveau cabinet, c'est le stop and go systématique", a-t-il complété, tout en invitant les représentants des urgentistes à venir échanger avec lui sur leurs priorités.
gl/nc/APMnews