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COVID-19: LE PR PERRONNE BLANCHI PAR LA JURIDICTION ORDINALE APRÈS SES PROPOS POLÉMIQUES SUR LA GESTION DE L'ÉPIDÉMIE

PARIS, 24 octobre 2022 (APMnews) - La chambre disciplinaire de première instance (CDPI) de l'ordre des médecins d'Ile-de-France a rejeté vendredi, contre toute attente, la plainte formée par le Conseil national de l'ordre des médecins (Cnom) contre le Pr Perronne, excluant toute faute déontologique dans ses propos polémiques tenus sur la gestion de la pandémie de Covid-19 courant 2020, a-t-on appris auprès de la juridiction ordinale.

Dans sa décision (5 pages) dont APMnews a eu copie, la juridiction ordinale évacue en une page chacun des reproches formulés contre le Pr Perronne, par le Cnom, parfois sans explications ou en prenant une position contradictoire avec les faits.

Sollicité par APMnews, le Cnom a fait savoir lundi que son président, le Dr François Arnault, allait interjeter appel à titre conservatoire, avant régularisation en session plénière à la mi-décembre.

La CDPI francilienne a par ailleurs rejeté vendredi la plainte formée à son égard par le Dr Nathan Peiffer-Smadja, infectiologue à l'hôpital Bichat (AP-HP, Paris), tout en sanctionnant ce dernier d'un avertissement pour manquement au devoir de confraternité à l'égard du Pr Perronne.

La juridiction ordinale avait examiné trois plaintes le 13 septembre, au cours d'une audience marquée par une manifestation de soutien au Pr Perronne verrouillée par les forces de l'ordre, à laquelle participaient de nombreuses figures de mouvements complotistes, antivax et antimasques (cf dépêche du 13/09/2022 à 19:20).

La première émanait du Cnom, qui a engagé début décembre 2020 des poursuites contre six médecins, principalement pour des propos tenus dans le cadre de l'épidémie de Covid-19 (cf dépêche du 22/12/2020 à 11:58) et deux plaintes croisées déposées par le Pr Perronne et le Dr Nathan Peiffer-Smadja.

Le Cnom avait saisi la juridiction disciplinaire du cas du Pr Perronne, après un premier signalement qui n'avait pas prospéré (cf dépêche du 25/06/2020 à 11:31), pour des propos tenus le 15 octobre 2020 sur l'antenne de Sud Radio, laissant entendre que les médecins généralistes et les établissements étaient incités financièrement à signaler des cas positifs au Covid-19 (cf dépêche du 20/10/2020 à 13:10).

Étaient également en cause ses propos tenus dans les médias au printemps 2020 alors qu'il faisait la promotion d'un ouvrage paru chez Albin Michel, intitulé "Y a-t-il une erreur qu'ils n'ont pas commise?" et sous-titré "L'union sacrée de l'incompétence et de l'arrogance" (cf dépêche du 18/06/2020 à 12:27).

Dans cet ouvrage, il se rallie au Pr Didier Raoult, ex-directeur de l'institut hospitalo-universitaire (IHU) Méditerranée Infection, pour promouvoir l'hydroxychloroquine (Plaquenil*, Sanofi) dans le traitement du Covid-19, dont l'efficacité supposée a pourtant été battue en brèche dès juin 2020. Depuis, des soupçons de falsification pèsent sur les travaux de l'IHU (cf dépêche du 06/09/2022 à 19:15 et dépêche du 19/11/2021 à 14:12).

Fin mai 2020, la propre équipe du Pr Perronne de l'hôpital Raymond-Poincaré (Garches, Hauts-de-Seine) avait retiré de la plateforme de preprint MedRxiv une étude favorable à l'hydroxychloroquine, largement biaisée (cf dépêche du 26/05/2020 à 12:03).

Interrogé l'avant-veille de la sortie du livre sur BFMTV, le Pr Perronne avait estimé que l'utilisation de l'hydroxychloroquine aurait permis d'éviter 25.000 décès, et accusé ses pairs de corruption par les laboratoires pharmaceutiques.

Le 18 juin 2020, lors d'un entretien avec Jean-Marc Morandini sur CNews, il avait accusé des confrères nantais hospitaliers d'avoir "laissé crever" son beau-frère touché par le Covid-19 en refusant de lui administrer de l'hydroxychloroquine.

Ces propos avaient suscité de vigoureuses réactions sur les réseaux sociaux, poussant par exemple le Dr Nathan Peiffer-Smadja à lancer le 19 juin 2020 une pétition qui avait recueilli plusieurs milliers de signatures, réclamant à l'ordre des médecins de se saisir du dossier.

Des justifications qui résistent mal aux faits

Le Cnom visait ainsi des manquements à sept articles du code de déontologie, dont les articles 2 (respect de la vie et de la dignité de la personne), 12 (concours apporté à la protection de la santé), 13 (information du public), 31 (déconsidération de la profession), 39 (proscription du charlatanisme), 56 (confraternité) et 109 (engagement au respect du code de déontologie).

"Les propos tenus par le Dr Perronne dans la presse nationale et sur différents réseaux sociaux ainsi que dans son livre apparaissent contraires à plusieurs règles de la déontologie médicale", expliquait le Cnom dans sa plainte, résumée dans la décision de la CDPI. Il pointait aussi ses "propos outranciers contraires à tout principe de dignité".

La CDPI a évacué l'ensemble des reproches, estimant d'abord qu'aucun des éléments du dossier ne permettait d'établir un manquement à l'article 2, soulignant que le Pr Perronne n'a "jamais refusé de soigner un malade et ne [s'est] jamais soustrait à ses obligations médicales".

Sur le concours aux politiques de santé publique et aux actions de vigilance sanitaire (article 12), la CDPI estime qu'"aucune pièce du dossier ne permet de dire que le Dr Perronne a refusé d'apporter sa participation à l'action entreprise par les autorités compétentes en vue de la protection de la santé et de l'éducation sanitaire".

"Ses prises de position en 2020 dans la presse ainsi que dans ses livres n'ont pas mis en danger l'action entreprise par les pouvoirs publics, dont les orientations ont changé à plusieurs reprises au cours de la période en cause", affirme ainsi la CDPI.

Quelques jours avant la décision du Cnom en décembre 2020, le Pr Perronne avait pourtant tenu des propos alarmistes sur les vaccins pandémiques à base d'ARN messager et remis en cause l'intérêt de la vaccination contre le Sars-CoV-2 (cf dépêche du 04/12/2020 à 12:53), ce qui lui avait valu d'être démis de ses fonctions de chef de service à l'hôpital de Garches quelques jours plus tard (cf dépêche du 17/12/2020 à 17:00 et dépêche du 21/12/2020 à 12:28).

S'agissant de l'obligation de prudence dans la communication vers le grand public, la CDPI a, là aussi, exclu tout manquement.

"Voix discordante sur un sujet d'intérêt général"

"Le Dr Perronne, spécialiste internationalement reconnu comme un expert dans le domaine de l'infectiologie, était le mieux à même de comprendre les enjeux de santé publique. S'il s'est exprimé dans la presse sur l'action du gouvernement et sur l'industrie pharmaceutique, ainsi qu'il était légitime à le faire et en avait même l'obligation dans ce domaine qui relevait de sa compétence, il s'est borné à porter publiquement mais sans invectives une voix discordante sur un sujet d'intérêt général", évacue la CDPI.

"Il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que ses propos n'entraient pas dans le cadre de la crise sanitaire et qu'à un quelconque moment il aurait appelé à la violence, ou incité à la haine, ou eu un discours 'antivax', ni qu'il se serait exprimé imprudemment ou de manière personnelle, ou dit que 'le vaccin tue'", estime la CDPI.

Le Pr Perronne a pourtant fait partie des critiques les plus virulentes et régulières depuis 2020 sur la vaccination contre le Covid-19, déniant leur qualité de vaccins en les qualifiant de "produits de thérapie génique" et reprochant aux autorités de faire de la population des "cobayes", rappelle-t-on.

Il avait confirmé sa position tout en relayant des affirmations infondées le 21 novembre 2021 dans l'émission "Les Points sur les i" sur CNews, selon lesquelles les personnes vaccinées mourraient "quatre fois plus" du Covid en Grande-Bretagne. Il affirmait aussi qu'il n'y avait "pas de morts" dans les pays ayant recours aux traitements précoces associant l'ivermectine, l'azithromycine, la doxycycline, le zinc et la vitamine D, alors qu'aucune étude n'a démontré leur efficacité dans le traitement du Covid-19.

Le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) avait par ailleurs mis en demeure les sociétés Radio Monte-Carlo (RMC) et Diversité TV France (groupe NextRadioTV) de "se conformer à l'avenir" à leurs obligations en matière d'honnêteté et d'indépendance de l'information, face au manque de contradiction opposée au Pr Perronne lors de l'émission "Les Grandes gueules" du 31 août 2020 (cf dépêche du 06/01/2021 à 16:15).

S'agissant du reproche de charlatanisme, la CDPI estime qu'aucun élément du dossier ne permet de démontrer que le Pr Perronne "aurait conseillé ou prescrit à ses malades un remède ou un procédé illusoire ou insuffisamment éprouvé", rejoignant ainsi l'argumentation de la CDPI de Nouvelle-Aquitaine qui avait écarté tout manquement du Pr Didier Raoult au regard de l'hydroxychloroquine (cf dépêche du 07/12/2021 à 13:55).

Sur le manquement à la confraternité, la CDPI estime que les critiques formulées contre les ministres de la santé successifs en 2020, Agnès Buzyn et Olivier Véran, eux-mêmes médecins, "concernaient ces personnes uniquement en tant qu'autorités sanitaires détenant un poste politique".

"Ainsi, alors même que ces autorités avaient également la qualité de médecins, le Dr Perronne ne saurait être regardé comme ayant méconnu, par les critiques dirigées à leur encontre, [le code de déontologie]", estime la CDPI.

Enfin, s'agissant des médecins que le Pr Perronne a accusés d'avoir causé le décès de son beau-frère sur la chaîne CNews, la CDPI exclut tout manquement au motif qu'il n'a pas divulgué leurs noms à l'antenne ni celui de l'établissement. "Dès lors qu'il ne faisait référence à eux que dans des termes impersonnels, il ne peut être regardé comme ayant 'gravement mis en cause des confrères'", selon la CDPI.

Le Dr Peiffer-Smadja, harcelé mais sanctionné

Dans une décision distincte, la CDPI a rejeté la plainte formée par le Dr Peiffer-Smadja, à laquelle le conseil départemental de l'ordre des médecins (CDOM) des Hauts-de-Seine s'était associé, et qui reprochait au Pr Perronne une série d'attaques personnelles dans des médias grand public en l'accusant notamment de cacher des liens d'intérêts, propos repris ensuite dans le film controversé "Hold Up" (cf dépêche du 27/11/2020 à 18:23), ce qui lui avait valu une campagne de cyberharcèlement sur les réseaux sociaux (cf dépêche du 19/11/2020 à 12:23).

La méta-analyse, mise en ligne fin août 2020 par la revue Clinical Microbiology and Infection, rapportait que le recours à l'hydroxychloroquine n'était pas associé à une baisse statistiquement significative de la mortalité dans le Covid-19, et que sa combinaison avec l'azithromycine était corrélée à un surrisque significatif de mortalité de 27% (cf dépêche du 27/08/2020 à 01:00).

Le Pr Perronne avait eu des propos peu amènes sur cette étude, la qualifiant de "dramatique" ou de "totalement" bidon et raillant leurs auteurs en les ramenant à leur qualité d'interne en médecine. "Ils se gaussent d'être des grands scientifiques, en plus, l'interne de Bichat qui s'appelle Nathan, il travaille actuellement à l'Imperial College à Londres. L'Imperial College qui est largement financé par Bill Gates [...]. Quand on travaille à l'Imperial College, on est sous influence", commentait le Pr Perronne.

La CDPI a exclu tout manquement du Pr Perronne, estimant que ses propos "visaient uniquement, et de manière impersonnelle, sa qualité d'auteur d'une étude critiquée" et qu'il n'avait "jamais reproché au Dr Peiffer-Smadja d'avoir omis de déclarer des conflits d'intérêts personnels, mais uniquement d'avoir des conflits d'intérêts d'ordre institutionnel".

À l’inverse, la CDPI a sanctionné le Dr Peiffer-Smadja d'un avertissement pour "14 tweets" publiés de mai à octobre 2020 relayant la pétition invitant à agir contre les propos diffusés par le Dr Perronne, estimant qu'il "exprimait à l'encontre de celui-ci des propos désobligeants, diffamatoires et injurieux, dénigrait son âge et insultait son honnêteté et ses compétences".

Le Dr Peiffer-Smadja n'était pas joignable dans l'immédiat.

vg/ab/APMnews

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PARIS, 24 octobre 2022 (APMnews) - La chambre disciplinaire de première instance (CDPI) de l'ordre des médecins d'Ile-de-France a rejeté vendredi, contre toute attente, la plainte formée par le Conseil national de l'ordre des médecins (Cnom) contre le Pr Perronne, excluant toute faute déontologique dans ses propos polémiques tenus sur la gestion de la pandémie de Covid-19 courant 2020, a-t-on appris auprès de la juridiction ordinale.

Dans sa décision (5 pages) dont APMnews a eu copie, la juridiction ordinale évacue en une page chacun des reproches formulés contre le Pr Perronne, par le Cnom, parfois sans explications ou en prenant une position contradictoire avec les faits.

Sollicité par APMnews, le Cnom a fait savoir lundi que son président, le Dr François Arnault, allait interjeter appel à titre conservatoire, avant régularisation en session plénière à la mi-décembre.

La CDPI francilienne a par ailleurs rejeté vendredi la plainte formée à son égard par le Dr Nathan Peiffer-Smadja, infectiologue à l'hôpital Bichat (AP-HP, Paris), tout en sanctionnant ce dernier d'un avertissement pour manquement au devoir de confraternité à l'égard du Pr Perronne.

La juridiction ordinale avait examiné trois plaintes le 13 septembre, au cours d'une audience marquée par une manifestation de soutien au Pr Perronne verrouillée par les forces de l'ordre, à laquelle participaient de nombreuses figures de mouvements complotistes, antivax et antimasques (cf dépêche du 13/09/2022 à 19:20).

La première émanait du Cnom, qui a engagé début décembre 2020 des poursuites contre six médecins, principalement pour des propos tenus dans le cadre de l'épidémie de Covid-19 (cf dépêche du 22/12/2020 à 11:58) et deux plaintes croisées déposées par le Pr Perronne et le Dr Nathan Peiffer-Smadja.

Le Cnom avait saisi la juridiction disciplinaire du cas du Pr Perronne, après un premier signalement qui n'avait pas prospéré (cf dépêche du 25/06/2020 à 11:31), pour des propos tenus le 15 octobre 2020 sur l'antenne de Sud Radio, laissant entendre que les médecins généralistes et les établissements étaient incités financièrement à signaler des cas positifs au Covid-19 (cf dépêche du 20/10/2020 à 13:10).

Étaient également en cause ses propos tenus dans les médias au printemps 2020 alors qu'il faisait la promotion d'un ouvrage paru chez Albin Michel, intitulé "Y a-t-il une erreur qu'ils n'ont pas commise?" et sous-titré "L'union sacrée de l'incompétence et de l'arrogance" (cf dépêche du 18/06/2020 à 12:27).

Dans cet ouvrage, il se rallie au Pr Didier Raoult, ex-directeur de l'institut hospitalo-universitaire (IHU) Méditerranée Infection, pour promouvoir l'hydroxychloroquine (Plaquenil*, Sanofi) dans le traitement du Covid-19, dont l'efficacité supposée a pourtant été battue en brèche dès juin 2020. Depuis, des soupçons de falsification pèsent sur les travaux de l'IHU (cf dépêche du 06/09/2022 à 19:15 et dépêche du 19/11/2021 à 14:12).

Fin mai 2020, la propre équipe du Pr Perronne de l'hôpital Raymond-Poincaré (Garches, Hauts-de-Seine) avait retiré de la plateforme de preprint MedRxiv une étude favorable à l'hydroxychloroquine, largement biaisée (cf dépêche du 26/05/2020 à 12:03).

Interrogé l'avant-veille de la sortie du livre sur BFMTV, le Pr Perronne avait estimé que l'utilisation de l'hydroxychloroquine aurait permis d'éviter 25.000 décès, et accusé ses pairs de corruption par les laboratoires pharmaceutiques.

Le 18 juin 2020, lors d'un entretien avec Jean-Marc Morandini sur CNews, il avait accusé des confrères nantais hospitaliers d'avoir "laissé crever" son beau-frère touché par le Covid-19 en refusant de lui administrer de l'hydroxychloroquine.

Ces propos avaient suscité de vigoureuses réactions sur les réseaux sociaux, poussant par exemple le Dr Nathan Peiffer-Smadja à lancer le 19 juin 2020 une pétition qui avait recueilli plusieurs milliers de signatures, réclamant à l'ordre des médecins de se saisir du dossier.

Des justifications qui résistent mal aux faits

Le Cnom visait ainsi des manquements à sept articles du code de déontologie, dont les articles 2 (respect de la vie et de la dignité de la personne), 12 (concours apporté à la protection de la santé), 13 (information du public), 31 (déconsidération de la profession), 39 (proscription du charlatanisme), 56 (confraternité) et 109 (engagement au respect du code de déontologie).

"Les propos tenus par le Dr Perronne dans la presse nationale et sur différents réseaux sociaux ainsi que dans son livre apparaissent contraires à plusieurs règles de la déontologie médicale", expliquait le Cnom dans sa plainte, résumée dans la décision de la CDPI. Il pointait aussi ses "propos outranciers contraires à tout principe de dignité".

La CDPI a évacué l'ensemble des reproches, estimant d'abord qu'aucun des éléments du dossier ne permettait d'établir un manquement à l'article 2, soulignant que le Pr Perronne n'a "jamais refusé de soigner un malade et ne [s'est] jamais soustrait à ses obligations médicales".

Sur le concours aux politiques de santé publique et aux actions de vigilance sanitaire (article 12), la CDPI estime qu'"aucune pièce du dossier ne permet de dire que le Dr Perronne a refusé d'apporter sa participation à l'action entreprise par les autorités compétentes en vue de la protection de la santé et de l'éducation sanitaire".

"Ses prises de position en 2020 dans la presse ainsi que dans ses livres n'ont pas mis en danger l'action entreprise par les pouvoirs publics, dont les orientations ont changé à plusieurs reprises au cours de la période en cause", affirme ainsi la CDPI.

Quelques jours avant la décision du Cnom en décembre 2020, le Pr Perronne avait pourtant tenu des propos alarmistes sur les vaccins pandémiques à base d'ARN messager et remis en cause l'intérêt de la vaccination contre le Sars-CoV-2 (cf dépêche du 04/12/2020 à 12:53), ce qui lui avait valu d'être démis de ses fonctions de chef de service à l'hôpital de Garches quelques jours plus tard (cf dépêche du 17/12/2020 à 17:00 et dépêche du 21/12/2020 à 12:28).

S'agissant de l'obligation de prudence dans la communication vers le grand public, la CDPI a, là aussi, exclu tout manquement.

"Voix discordante sur un sujet d'intérêt général"

"Le Dr Perronne, spécialiste internationalement reconnu comme un expert dans le domaine de l'infectiologie, était le mieux à même de comprendre les enjeux de santé publique. S'il s'est exprimé dans la presse sur l'action du gouvernement et sur l'industrie pharmaceutique, ainsi qu'il était légitime à le faire et en avait même l'obligation dans ce domaine qui relevait de sa compétence, il s'est borné à porter publiquement mais sans invectives une voix discordante sur un sujet d'intérêt général", évacue la CDPI.

"Il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que ses propos n'entraient pas dans le cadre de la crise sanitaire et qu'à un quelconque moment il aurait appelé à la violence, ou incité à la haine, ou eu un discours 'antivax', ni qu'il se serait exprimé imprudemment ou de manière personnelle, ou dit que 'le vaccin tue'", estime la CDPI.

Le Pr Perronne a pourtant fait partie des critiques les plus virulentes et régulières depuis 2020 sur la vaccination contre le Covid-19, déniant leur qualité de vaccins en les qualifiant de "produits de thérapie génique" et reprochant aux autorités de faire de la population des "cobayes", rappelle-t-on.

Il avait confirmé sa position tout en relayant des affirmations infondées le 21 novembre 2021 dans l'émission "Les Points sur les i" sur CNews, selon lesquelles les personnes vaccinées mourraient "quatre fois plus" du Covid en Grande-Bretagne. Il affirmait aussi qu'il n'y avait "pas de morts" dans les pays ayant recours aux traitements précoces associant l'ivermectine, l'azithromycine, la doxycycline, le zinc et la vitamine D, alors qu'aucune étude n'a démontré leur efficacité dans le traitement du Covid-19.

Le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) avait par ailleurs mis en demeure les sociétés Radio Monte-Carlo (RMC) et Diversité TV France (groupe NextRadioTV) de "se conformer à l'avenir" à leurs obligations en matière d'honnêteté et d'indépendance de l'information, face au manque de contradiction opposée au Pr Perronne lors de l'émission "Les Grandes gueules" du 31 août 2020 (cf dépêche du 06/01/2021 à 16:15).

S'agissant du reproche de charlatanisme, la CDPI estime qu'aucun élément du dossier ne permet de démontrer que le Pr Perronne "aurait conseillé ou prescrit à ses malades un remède ou un procédé illusoire ou insuffisamment éprouvé", rejoignant ainsi l'argumentation de la CDPI de Nouvelle-Aquitaine qui avait écarté tout manquement du Pr Didier Raoult au regard de l'hydroxychloroquine (cf dépêche du 07/12/2021 à 13:55).

Sur le manquement à la confraternité, la CDPI estime que les critiques formulées contre les ministres de la santé successifs en 2020, Agnès Buzyn et Olivier Véran, eux-mêmes médecins, "concernaient ces personnes uniquement en tant qu'autorités sanitaires détenant un poste politique".

"Ainsi, alors même que ces autorités avaient également la qualité de médecins, le Dr Perronne ne saurait être regardé comme ayant méconnu, par les critiques dirigées à leur encontre, [le code de déontologie]", estime la CDPI.

Enfin, s'agissant des médecins que le Pr Perronne a accusés d'avoir causé le décès de son beau-frère sur la chaîne CNews, la CDPI exclut tout manquement au motif qu'il n'a pas divulgué leurs noms à l'antenne ni celui de l'établissement. "Dès lors qu'il ne faisait référence à eux que dans des termes impersonnels, il ne peut être regardé comme ayant 'gravement mis en cause des confrères'", selon la CDPI.

Le Dr Peiffer-Smadja, harcelé mais sanctionné

Dans une décision distincte, la CDPI a rejeté la plainte formée par le Dr Peiffer-Smadja, à laquelle le conseil départemental de l'ordre des médecins (CDOM) des Hauts-de-Seine s'était associé, et qui reprochait au Pr Perronne une série d'attaques personnelles dans des médias grand public en l'accusant notamment de cacher des liens d'intérêts, propos repris ensuite dans le film controversé "Hold Up" (cf dépêche du 27/11/2020 à 18:23), ce qui lui avait valu une campagne de cyberharcèlement sur les réseaux sociaux (cf dépêche du 19/11/2020 à 12:23).

La méta-analyse, mise en ligne fin août 2020 par la revue Clinical Microbiology and Infection, rapportait que le recours à l'hydroxychloroquine n'était pas associé à une baisse statistiquement significative de la mortalité dans le Covid-19, et que sa combinaison avec l'azithromycine était corrélée à un surrisque significatif de mortalité de 27% (cf dépêche du 27/08/2020 à 01:00).

Le Pr Perronne avait eu des propos peu amènes sur cette étude, la qualifiant de "dramatique" ou de "totalement" bidon et raillant leurs auteurs en les ramenant à leur qualité d'interne en médecine. "Ils se gaussent d'être des grands scientifiques, en plus, l'interne de Bichat qui s'appelle Nathan, il travaille actuellement à l'Imperial College à Londres. L'Imperial College qui est largement financé par Bill Gates [...]. Quand on travaille à l'Imperial College, on est sous influence", commentait le Pr Perronne.

La CDPI a exclu tout manquement du Pr Perronne, estimant que ses propos "visaient uniquement, et de manière impersonnelle, sa qualité d'auteur d'une étude critiquée" et qu'il n'avait "jamais reproché au Dr Peiffer-Smadja d'avoir omis de déclarer des conflits d'intérêts personnels, mais uniquement d'avoir des conflits d'intérêts d'ordre institutionnel".

À l’inverse, la CDPI a sanctionné le Dr Peiffer-Smadja d'un avertissement pour "14 tweets" publiés de mai à octobre 2020 relayant la pétition invitant à agir contre les propos diffusés par le Dr Perronne, estimant qu'il "exprimait à l'encontre de celui-ci des propos désobligeants, diffamatoires et injurieux, dénigrait son âge et insultait son honnêteté et ses compétences".

Le Dr Peiffer-Smadja n'était pas joignable dans l'immédiat.

vg/ab/APMnews

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